Jusqu’aux années 1980, le jeu de football a peiné à s’installer sur le marché du jeu vidéo, confronté aux limites techniques des consoles de l’époque et à une industrie en crise. Mais les succès des productions amateures, Kick-Off en tête, laisse penser qu’à la veille des années 1990, le football a désormais tout pour réussir sa transition dans le monde virtuel. Des éditeurs plus développés n’en demandent pas plus pour tenter leur chance.
Parmi les plus grands développeurs des années 1990, Konami, société japonaise riche des succès de Castelvania ou Metal Gear, est le premier à tenter de surpasser Kick-off. Mais pour sa première tentative, la société connait un échec cinglant en 1991 : son Konami Hyper Soccer paru sur Nes, suite d’un Konami’s Soccer passé complètement inaperçu en 1985, semble assez archaïque puisque l’on revient à un jeu où l’on contrôle trois joueurs simultanément. Mais Konami n’en reste pas là : la firme prend note de son échec et attend trois ans avant de proposer en 1994 un deuxième jeu de football qui bouleversera à jamais l’industrie…
Les premiers pas de PES et FIFA
Le 11 novembre 1994, International Superstar Soccer, deuxième titre de Konami sur le foot, sort au Japon sur Super Nintendo et s’affirme tout de suite comme une nouvelle référence en la matière, au point de s’exporter vers les Etats-Unis et l’Europe en mai de l’année suivante. Le jeu, plus couramment appelé « ISS », réussit en prenant le contre-pied de Kick-Off. Là où ce dernier misait sur une vue en plongée et exigeait une réelle finesse technique pour développer les actions, le produit de Konami traduit le football comme le fait la télévision, avec une caméra filmant le terrain horizontalement avec un zoom assez rapproché des joueurs. C’est l’univers du match de football dans son ensemble qui est traité dans ISS : les joueurs simulent, célèbrent leurs buts, des photographes tentent de capturer l’action derrière les buts et, sur la version Japonaise, des voix digitalisées commentent le match. Techniquement, le titre est donc un succès faramineux, mais le gameplay d’ISS est aussi l’un des plus fiables de l’époque, si bien que le jeu reçoit des critiques très positives, poussant Konami à continuer de s’investir dans les jeux de foot. La société japonaise va vite comprendre qu’elle peut prendre la place de numéro 1 sur le marché et sort dès l’année 1995 ISS Deluxe, toujours sur Super Nintendo, qui apparaît comme une version améliorée du premier ISS : plus d’équipes sont jouables, le gameplay apparaît plus complet avec l’introduction des passes aériennes et la possibilité de mettre un effet dans ses frappes… Si le jeu est un succès critique sans conteste, particulièrement en France, la saga des ISS n’écrase pas le marché au niveau des ventes et les éditions suivantes rencontreront la même trajectoire. En 1996, ISS prend le risque de la 3D avec ISS 64 paru sur Nintendo 64. Le jeu est, pour l’époque, une véritable claque visuelle et, par l’introduction de la passe en profondeur, révolutionne profondément la manière de jouer dans les jeux de foot. Ce premier succès sur Nintento 64 est à attribué au studio de développement situé à Osaka qui, au sein de Konami, est en rivalité avec celui de Tokyo. Ce dernier est en charge des jeux qui paraîtront sur Playstation, et venait de sortir avec beaucoup moins de réussite Goal Storm en 1995. Si le studio de Tokyo paraît alors considérablement en retard sur celui d’Osaka, il profite du revirement stratégique de Konami du milieu des années 1990, qui décide de s’éloigner de Nintendo pour se concentrer sur les consoles Playstation et Saturn, pour prendre les devants dans la série des ISS. C’est chose faite en 1998 avec International Superstar Soccer Pro 98 sorti sur Playstation, qui reprend les innovations des précédents ISS pour présenter une version encore plus complète et agréable en main, qui ne manque pas de se faire apprécier par la critique. Mais la véritable apogée de la saga des ISS vient de l’édition suivante : en 1999, ISS Pro Evolution s’apparente sans conteste comme le meilleur jeu de football jamais vu jusqu’alors. S’appuyant sur l’excellence du gameplay des précédentes versions, le jeu se démarque d’abord par l’aspect technique : les joueurs sont ici véritablement modélisés, au niveau de leur physique mais pour certains même de leur animation (Roberto Carlos a sa propre animation pour frapper les coup-francs), si bien que l’on peut tenter de les reconnaître même si leurs noms sont transformés faute de droits. Mais c’est aussi au niveau du contenu qu’ISS Pro Evolution innove, puisque la désormais légendaire Ligue des Masters fait son apparition et augmente considérablement la durée de vie du jeu. Le principe de ce mode ? Le joueur contrôle une des 16 équipes d’une ligue fermée composée des meilleurs clubs européens de l’époque, dont chaque joueur est remplacé par des joueurs fictifs. De là, il faudra améliorer son équipe en recrutant sur le marché des transferts des joueurs réels pour tenter de remporter le championnat. La Ligue des Masters est depuis un incontournable de tout jeu de foot de Konami, même si certains de ses principes ont évolué au fil des jeux. La suite d’ISS Pro Evolution, ISS Pro Evolution 2, parue en 2000, apparaît encore meilleur dans chaque aspect, et le fossé avec les autres jeux de football, que ça soit d’un point de vue qualitatif ou des ventes, continue de se creuser.
Si au tournant des années 2000, Konami semble avoir pris le leadership sur le marché de jeux de football, celui-ci a été disputé pendant une longue partie des années 1990 par un titre lui aussi né au cours de cette décennie : FIFA. En 1991, la société américaine Electronic Arts décide d’ouvrir un sous-label, EA Sports, spécialisé, comme son nom l’indique, dans le développent et la production de jeux de sport. Poussé par les premiers succès des Madden NFL et des NHL, simulations de football américain et de hockey, EA réfléchit alors à la possibilité de se lancer dans le marché du jeu de foot, malgré le scepticisme de beaucoup de leurs dirigeants. Selon Marc Aubenel, producteur de FIFA de ses débuts jusqu’en 2006, la direction de EA « ne pensait pas que nous allions vendre un seul exemplaire de ce jeu. Ils pensaient que ce serait un désastre complet ». Il faut dire que le football est alors relativement peu encré aux États-Unis, alors même que les jeux d’EA Sports s’exportent peu des States à cette époque. Se lancer dans le jeu de football apparaît comme un pari risqué mais qui peut rapporter gros : une opportunité d’introduire la marque en Europe. Au début des années 1990, ce sont deux développeurs britanniques indépendants, Jules Burt et John Law, qui ont la lourde tâche de convaincre la direction d’EA Sports avec leurs premiers prototypes. L’opération séduction est réussie et il ne reste plus qu’à trouver un nom au jeu avant de le publier. Si certains veulent l’appeler sobrement « EA Soccer », d’autres remarquent assez vite que les droits de la FIFA n’ont alors été exploités par aucun développeurs et nouent un accord avec la fédération internationale de football. Ainsi, en 1993, FIFA International Soccer sort sur Megadrive et rencontre un succès immédiat : à l’approche de la Coupe du Monde 1994, voir arriver un jeu de foot offrant la possibilité de contrôler 48 sélections nationales séduit le grand public, et plus de 500 000 copies sont vendues lors des quatre premières semaines suivant la sortie du jeu. Commercialement parlant, EA Sport réussit donc son entrée bien mieux que Konami. Les inquiétudes de certains dirigeants de la société n’ont plus lieu d’être et FIFA va devenir, au fil de ses éditions annuelles, l’un de ses produits phares. Si au fil des années, le jeu va s’enrichir au niveau du contenu ou du gameplay et continuera de connaître des succès commerciaux importants, on constate que son rival, ISS progresse plus rapidement et convainc souvent la critique qui le considère plus réaliste là où FIFA joue la carte d’un jeu plus léger. Au moment de changer de millénaire, la sortie consécutive des deux ISS Pro Evolution inverse assez nettement la hiérarchie : Konami dépasse EA et prend la place de numéro 1 sur le marché du football.
Un marché, deux mastodontes… et demie
Les années 1990 ont ainsi signé la fin de la saturation du marché du jeu de football. Le temps où chaque producteur amateur pouvait espérer produire un meilleur jeu que certaines grandes sociétés semble révolu et les ventes se polarisent autour de deux références : FIFA d’un côté et ISS de l’autre, ce-dernier ayant pris une légère avance. C’est Konami qui va se démarquer le premier au début du nouveau siècle avec la sortie en 2001 de Pro Evolution Soccer (PES) qui prend la digne succession des ISS. Le jeu profite de la jeunesse de la Playstation 2, sortie à la fin de l’année 2000 en Europe et en Amérique du Nord pour s’imposer comme le premier jeu de football de référence de la console et se vendre à près de 1,75 million d’exemplaires à travers le monde. De là, le fossé séparant FIFA et PES va véritablement se creuser : EA Sports a beau sortir des jeux assez réussis, la dynamique est clairement à l’avantage de Konami, les PES sont désormais attendu chaque année attendus tel un évènement, comme si la saison de football ne pouvait réellement commencer qu’à la sortie du jeu. La communauté du jeu s’agrandit si bien que les tournois émergent partout en France au début des années 2000. Alors que la PlayStation 3 est prévue pour la fin d’année 2006 au Japon et pour début 2007 en France, l’écart entre FIFA et PES semble même incommensurable. De son côté, PES est tout simplement à son apogée suite aux sorties de PES 5 et 6, tous deux aujourd’hui encore considérés parmi les plus grands jeux de foot de l’histoire. Qui n’a jamais entendu parlé des missiles d’Adriano sur PES 6 ? Cette dernière version marque particulièrement les esprits, notamment en France où elle s’écoule à près de 1,6 millions d’exemplaires, ce qui en fait, comme PES 5, le produit culturel le plus vendu de l’année en Hexagone. Mais à l’inverse, EA Sports sort à la même période l’une de ses pires éditions avec FIFA 07, qualifié de « bouse » par Sebastian Enrique, producteur de la saga. À l’arrivée d’une nouvelle génération de console, les positions forgées au début des années 2000 se sont ainsi renforcées, et rares sont ceux qui avaient devinés qu’elles s’inverseraient.
Car l’arrivée de la PlayStation 3 va en effet profondément troubler la hiérarchie entre les deux mastodontes. À la surprise générale, Konami n’est pas prêt pour la transition vers une nouvelle génération de console : PES 2007 ne voit pas le jour et la version 2008 déçoit. Le jeu n’est pas à la hauteur des attentes techniques que génèrent l’arrivée de la PS3 et la licence est accusée de trop se reposer sur ses lauriers au lieu d’innover. Si commercialement PES peut se nourrir des succès des précédents pour vendre en grande quantité, FIFA a une opportunité en or de refaire son retard. L’occasion est saisie par les équipes d’EA Sports, décidées à rebondir après l’échec de FIFA 07. Ainsi, FIFA 08, à l’inverse de son concurrent, répond aux attentes de la PS3 et innove avec l’apparition du mode « Deviens pro » qui propose d’incarner un seul joueur et non pas l’équipe entière. L’année suivante, les yeux commencent donc à se river vers le produit d’EA Sport alors que Konami ne parvient pas à donner un nouveau souffle à sa licence. Les deux éditions suivants FIFA 08 donnent une tournure nouvelle au jeu : le gameplay est ralenti et les matchs deviennent moins folklorique, laissant place à un réalisme plus prononcé qui convainc mêmes les plus fidèles fans de PES. En l’espace de quelques années et à l’approche d’une nouvelle décennie, EA Sports est parvenu à inverser complètement son rapport de force avec Konami. Le schéma du début des années 2000 se reproduit dans les années 2010, dans l’autre sens cette fois-ci, puisque FIFA va creuser l’écart sur son concurrent. Les années 2013 et 2014 illustrent ce phénomène à la perfection : en 2013, FIFA s’écoule à presque 12 millions d’exemplaires dans le monde et en 2014, FIFA 15 réitère l’exploit de PES 5 et 6 en devenant le produit culturel le plus vendu en France avec près de 1,3 million d’unités. La même année, PES fait à peine mieux avec plus d’1,7 million d’exemplaires vendus… mais dans le monde entier. Alors comment combler l’écart ? Konami n’a pas encore la solution en main puisque FIFA continue de dominer largement le marché mais a le mérite de ne pas reproduire ses erreurs passées. Ainsi, PES 2014, à l’inverse de son concurrent, ne sort pas sur PlayStation 4 car la société Japonaise sait cette fois-ci qu’elle n’est pas prête à changer de génération. D’un point de vue du gameplay, PES est aussi revenu vers un format qui se veut plus lent et réaliste que FIFA et le travail paye puisque lors des dernières éditions, les critiques se montrent en général plus sévères avec le jeu d’EA Sports qu’avec celui de Konami, sans que cela n’ait encore d’impact marquant sur les ventes.
Mais, alors, FIFA et PES ont-ils été dominants au point qu’aucun autre jeu de football ne puisse faire son chemin ? Tout n’est, heureusement, pas aussi simple, et un autre type de jeu de foot a réussi son pari : les jeux de gestion, parmi lesquels l’inévitable Football Manager. Ici, le point de vue est complètement différent : si FIFA et PES tentent de représenter un match de foot comme le fait la télévision, les jeux de gestions proposent d’incarner un entraîneur devant prendre en charge de multiples aspects du métier pour faire progresser son club au fil des saisons. Si Football Manager est aujourd’hui la référence parmi ces jeux de gestion, il n’était au départ pas destiné à rencontrer un tel succès. Depuis petit, le britannique Kevin Toms a un rêve : créer un jeu de management de foot. Alors quand il se tourne vers une vie de programmeur informatique, il en profite pour développer un jeu de ce style sur son temps libre. En 1982, il sort ainsi Football Manager, sans penser alors avoir eu l’idée du siècle, comme il l’expliquera plusieurs décennies plus tard : « Ma priorité est de faire des jeux qui me plaisent, pas de créer une marque ». Et pourtant, en six ans le jeu s’écoulera à plus de 500 000 exemplaires, plus que satisfaisant pour un jeu totalement amateur dont le concept innove. La première série des Football Manager va ainsi connaître quelques suites (Football Manager 2, Football Manager World Cup Edition), mais la concurrence imposée par Player Manager -création d’un certain Dino Dini, déjà développeur du légendaire Kick-Off va stopper la série dans sa progression et pousse Kevin Toms à jetter l’éponge au début des années 1990. Une place se libère donc sur ce marché nouveau et les frères anglais Paul et Olivier Collyer vont saisir leur chance avec Championship Manager, ou L’Entraîneur en français, en 1992. Si le succès de ce Championship Manager reste assez modeste, sa suite parue en 1995 va clairement devenir la référence de l’époque en terme de jeux de gestion. Un an plus tôt, les frères Collyer lançaient leur propre studio de développement de jeux-vidéos, Sports Interactive, aidés par un fan de Championship Manager, Miles Jacobson, qui deviendra ensuite le directeur du studio. La série des Championship Manager peut alors se développer sur des bases plus stables et élargit au fil des années sa communauté, s’affirmant comme le leader dans sa catégorie. Mais en 2004, Sports Interactive décide de quitter son éditeur, Edios Interactive, qui conserve cependant les droits de Championship Manager. L’équipe de Miles Jacobson doit donc trouver un autre nom pour ses futurs produits et décide de racheter à Kevin Toms les droits de Football Manager. Ainsi, « FM » va redevenir près de 20 ans plus tard la vedette des jeux de gestion, effaçant la concurrence de… Championship Manager, qui s’arrêtera à l’édition 2010, mais aussi de FIFA Manager, jeu développé pendant 15 ans (de 1999 à 2014) par EA Sports. Alors que manque-t-il à Football Manager pour atteindre le succès commercial des FIFA et PES ? Tout d’abord, le moteur graphique de FM, qui a intégré des graphismes en 3D depuis 2008, garde encore un large retard sur celui des jeux phares de simulation, ce qui peut repousser un certain nombre de joueurs. Mais selon Miles Jacobson, la principale difficulté est ailleurs : « Le plus gros obstacle pour nous c’est que nos jeux nécessitent beaucoup plus de réflexion que de dextérité à la souris, et requièrent aussi de la patience et beaucoup plus de temps de jeu que la plupart des autres jeux ». Ainsi, si Football Manager a clairement trouvé sa place sur le marché, combinant succès critique et jeux vendus généralement à plus d’un million d’unités, il n’est pas encore en position de menacer commercialement FIFA ou PES.
Les dynamiques actuelles : une inversion de l’influence ?
Pendant longtemps, le principal défi des jeux de foot a été de reproduire le plus précisément possible ce qui se passait sur le terrain. Si le jeu de foot a donc longtemps été dépendant du « vrai » foot, des éléments récents tendent à montrer que ce rapport pourrait s’inverser. D’abord, le jeu de football a pu se stabiliser sur d’autres marchés et établir un nouveau domaine économique en se basant sur les compétitions d’E-Sport. Les tournois se sont multipliés et professionnalisés au fil du 21ème siècle, débutant sur PES et prenant une place plus importante sur FIFA, principal jeu de football a être représenté lors des compétitions. La communauté d’E-Sport n’a cessé de s’agrandir en France et a trouvé écho dans les médias, puisque BeIN Sports notamment a lancé une émission hebdomadaire sur ce sport en France, retransmettant aussi certaines compétitions de FIFA. Mais au-delà d’avoir trouvé une certaine forme d’indépendance, les jeux de football semblent même influencer à leur manière le foot dans sa globalité. Des clubs de football ont par exemple directement avouer qu’ils s’aidaient de l’énorme base de données de Football Manager pour étudier certains joueurs, futurs adversaires ou recrues. En 2011, Jonathan Beilin, jeune recruteur à l’OGC Nice, avoue avoir utilisé FM pour recruter Nemanja Pejčinović et explique des années plus tard avoir « failli [se] faire virer pour ça ». Depuis, les révélations de ce type sont communes. Mais l’influence touche-t-elle aussi le « consommateur » de football ? Beaucoup craignent que les jeux de simulation, tout particulièrement FIFA, influe sur la manière dont les fans regardent le football et jugent les joueurs, parfois simplement en fonction de leurs compétences virtuelles. Par exemple, les fans d’Adriano le sont-ils parce que ce-dernier les a ébloui balle aux pieds ou car il leur a offert un nombre incalculable de victoires sur PES 6 ? Si les jeux de football peuvent potentiellement influencer positivement la réalité, il semble donc qu’il ne faut pas regarder le foot uniquement sous leur prisme si l’on ne souhaite pas voir notre sport prendre la tournure que Jacques-Henri Eyrault le aimerait quand il déclarait en 2019 « Pourquoi le jeu FIFA propose aujourd’hui qu’un but mis en dehors de la surface remporte deux points ? Pourquoi cela ne pourrait pas être le cas dans la vie réelle ? ».
Toutefois, le jeu de football ne s’est pas détaché complètement de l’influence du ballon rond, et ne le fera probablement jamais. La raison est simple : il doit tenir compte des évolutions du foot pour répondre au défi de réalisme qu’il s’est lui-même imposé. Ainsi, alors que le football féminin est de plus en plus médiatisé, FIFA a commencé intégré des sélections féminines dans FIFA 16, même si PES ne l’a, pour l’instant, pas encore suivi. De son côté, Football Manager a intégrer depuis 2018 le VAR dans ses matchs, qui peut parfois se révéler aussi frustrant que dans la réalité. Aussi, bien que commercialement les jeux de football perçoivent une nouvelle source de revenu via le développement de l’E-Sport, ils sont obligés de cibler les fans de football, parfois pas intéressés par les compétitions virtuelles, pour continuer de toucher un public large. Dans cette optique, les développeurs continuent de mettre chaque année en avant sur les jacquettes des différents jeux des joueurs qui sont censés parler à chaque fan de football. Cibler le joueur le plus à même de représenter au mieux le jeu est d’ailleurs devenu l’un des principaux objectifs de FIFA et PES dans leur stratégie de communication. Souvent, leur plan est de miser sur un poids lourd sur le long terme, Cristiano Ronaldo et Lionel Messi en tête, qui peut être accompagné par un joueur adapté en fonction du marché local (Antoine Griezmann accompagnait par exemple Messi sur FIFA 15 pour la version française, Jordan Henderson été lui sélectionné pour le marché britannique) ou remplacé si aucun accord n’est trouvé par un joueur pour l’instant moins installé mais en lequel l’éditeur croit beaucoup. Ainsi, Adam Bhatti explique que pour la jacquette de PES 2016, Konami a décidé de miser sur Neymar, « superstar déjà bien installée » et Alvaro Morata qui « a le potentiel pour le devenir aussi ». Ainsi, que ce soit pour l’aspect commercial ou pour celui du réalisme, le jeu de football ne peut pas encore totalement se détacher, et heureusement peut-être, du sport qu’il simule.
À l’image de celle du sport qu’il représente, l’histoire du jeu de football est riche de rebondissements. Alors que le football semblait au départ difficilement adaptable aux jeux vidéos, le remarquable travail de nombreux amateurs dans les années 1980 a démontré le contraire, préparant le terrain pour l’arrivée de plus grosses sociétés d’édition et de titres qui mettront fin à la concurrence. FIFA et PES sont devenus, chacun leur tour, des produits culturels incontournables, parmi les plus vendus au monde, au point même que leur influence semble s’étendre, pour le meilleur et le pire, au football réel.
Crédit photos : Iconsport.
Sources :
- Ouest-France, De Kick-off à Fifa, l’histoire du foot en jeu vidéo
- L’Equipe, Avant la sortie de FIFA 20, l’histoire du jeu de foot d’EA Sports
- L’Equipe, Avant la sortie d’EFootball PES 2020, l’histoire de la licence de Konami
- MCVUK, Rejection, tragedy and billions of dollars – The story of Fifa
- Le Monde, Fifa : du jeu vidéo délaissé au produit culturel le plus vendu en France
- Le Monde, Neymar, Griezmann, Messi : Comment les sportifs atterrissent sur les jacquettes de Fifa et PES ?
- Redbull, La grande histoire de Football Manager
- So Foot, Jonathan Beilin : « Football Manager était toujours allumé »
- The Conversation, Comment les jeux de foot influencent la réalité et inversement
- The Guardian, Fifa, the video game that changed football
- L’histoire du jeu de foot : https://www.youtube.com/watch?v=GBXi8ivRrDg
- PES : Evolutions d’une saga mythique – Dans la légende : https://www.youtube.com/watch?v=SZJjcwRYaUY