Pour beaucoup, le football romantique a disparu. Finis, les joueurs d’un seul club comme avant. Finis, les attaquants à l’ancienne, renards des surfaces. Bien avant Raùl, l’Espagne a connu ce genre de phénomène. Incarnation de ce football romantique et populaire, joueur d’un seul club (ou presque), Enrique Castro González, dit Quini, fut l’un des plus fidèles représentants des Asturies tout en étant l’idole d’un pays divisé par ses luttes régionales. Aimé de toute l’Espagne pour sa générosité, le buteur asturien est un attaquant à l’ancienne comme on n’en fait plus. Victime d’un des faits divers les plus médiatiques du début des années 1980, Quini fut l’un des plus grands buteurs de l’histoire de l’Espagne.
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Ce dimanche 1er mars 1981 est une formalité pour le FC Barcelone. A la lutte pour le titre avec l’Atlético Madrid, les Blaugranas s’imposent au Camp Nou sur le score fleuve de 6-0 face à l’Hercules Alicante. Grâce à son doublé, Quini s’est une nouvelle fois illustré. Le multiple Pichichi est d’ailleurs élu « homme du match », de quoi préparer de bonne manière cette rencontre décisive contre le leader Colchonero au programme du week-end prochain. En attendant, les Barcelonais peuvent rentrer chez eux le sentiment du devoir accompli. C’est le chemin que prend Quini après avoir répondu aux dernières questions des journalistes. Un petit détour par la maison avant d’aller chercher sa femme à l’aéroport, cette dernière s’étant accordée un week-end hors de la métropole barcelonaise. Mais Quini n’arrive jamais. Quelques instants après être parti de chez lui, l’avant-centre espagnol fait face à trois hommes dans une station essence. Le revolver braqué sur lui, les trois individus enlèvent le buteur de la Roja, puis l’enferment dans une cave. Celui qu’on surnomme El Brujo (le sorcier) pense alors avoir joué, ce soir, le dernier match de sa vie. Dans ces moments-là, alors que la vie ne tient sans doute plus qu’à un fil et que les lendemains sont incertains, que décider ? Garder espoir ? Mettre un terme à sa vie, si courte fut-elle ? Avant de faire un choix, le moment vient de se remémorer les grands moments de son existence.
L’éclosion sur des terrains de charbon
Enrique Castro González nait le 23 septembre 1949 à Oviedo, la capitale des Asturies. C’est là qu’il vit les cinq premières années de sa vie avant de déménager et de passer le reste de sa jeunesse à quelques kilomètres, à Llaranes. Le petit Enrique est élevé dans une famille ouvrière. Son père travaille pour la Ensidesa (Empresa Nacional Siderúrgica Sociedad Anónim), entreprise de sidérurgie espagnole créée récemment dans la région afin de soutenir la croissance de l’économie espagnole durant les années 1960. Là-bas, Enrique touche ses premiers ballons avec ses deux petits frères Jesús et Rafael qui, eux aussi, réussiront une carrière intéressante de gardien du côté de Gijón ; certes moins fructueuse que leur aîné. La fratrie découvre le football sur les terrains de charbon alentours. Un amour du ballon incontestablement transmis par leur père. Ce fils d’ouvrier est plein d’énergie. Il pense football, il rêve football, il vit football. Dès la sortie de l’école, il court jouer avec ses amis dans la rue ou bien pour son équipe junior, le Don Bosco.
Quini commence sa carrière dans l’équipe de la Ensidesa à ses 18 ans. Il quitte l’école pour se consacrer à son football. Malgré le statut d’équipe d’entreprise, la CD Ensidesa n’évolue pas en amateur mais en troisième division espagnole. C’est lors de la saison 1967-1968 qu’il explose aux yeux des recruteurs la région. Avec 17 buts en 22 rencontres, Quini attire l’attention des clubs plus huppés des Asturies. A commencer par le Real Oviedo, le club de sa ville de naissance. Mais c’est une autre équipe qui va avoir la chance de signer le jeune prodige grâce à un certain José Luis Molinuevo. L’entraineur de la CD Ensidesa va permettre à la carrière de Quini de prendre une toute autre tournure. Lors d’une partie contre la filiale du Real Gijón, Quini est titularisé en pointe au lieu de son habituel côté droit. Le jeune homme peut être reconnaissant à vie envers son entraineur. Grâce à ce repositionnement, il inscrit un quadruplé. Une performance récompensée puisqu’en décembre 1968, le Real Gijón qui cherchait un nouvel attaquant s’attache les services de ce fils d’ouvrier qui les a mis à terre quelques semaines plus tôt. Direction la deuxième division.
Enfant de la région, joueur d’un club
Une carrière se joue parfois à un repositionnement. Quini n’a en tout cas pas laissé passer sa chance. Le début d’une longue histoire d’amour est en marche. Pendant douze ans, le buteur nouera l’une des plus belles relations qui puisse exister entre un club et un joueur. Lui, l’enfant de la région, protagoniste de ce football romantique d’autrefois. Auteur de 15 buts en quelques mois, Quini envoûte rapidement le stade El Molinón. Des débuts prometteurs pour entamer la saison suivante dans les meilleures conditions. Cette dernière est la saison de la promotion, puisque le Real Gijón termine champion de Segunda División. Quini n’est pas étranger à cette montée, terminant meilleur buteur du championnat et s’adjugeant ainsi son premier trophée de Pichichi avec 24 réalisations. Le premier d’une longue série. Les portes du haut niveau s’ouvrent dorénavant au jeune fils d’ouvrier. Quel chemin parcouru ! Une promotion et un changement de nom pour le club qui redevient le Real Sporting de Gijón.
Une première saison dans l’élite n’effraie pas le petit attaquant. Avec 13 buts en 30 matches, le bilan est plus qu’honorable et au-delà des attentes. Le club parvient à se maintenir quelques saisons et atteint même la demi-finale de la Coupe du Roi lors de l’édition 1972-1973. Pendant ce temps, Quini remporte ses premières distinctions individuelles en première division en finissant deux fois meilleur buteur à l’issue des saison 1974 et 1976 après avoir marqué respectivement 20 et 21 buts. C’est là qu’il gagne le surnom de Brujo : lorsque le buteur apparait aux yeux des défenses adverses, il est déjà trop tard et celui-ci était déjà parti marquer. Son sens de l’anticipation et du placement fait sa force. Il est déjà l’un des meilleurs joueurs du championnat.
Malgré les performances de son serial buteur, le club ne se maintient pas et descend à l’issue de la saison 1976. Si les grands clubs aguichent le joueur, et notamment le Barça qui propose 50 millions de pesetas, Quinigol reste fidèle à son équipe et à sa région, décidant de ne pas abandonner le navire. Il s’agit d’une jeune équipe composée de talents locaux, parfois coéquipiers de Quini depuis la Ensidesa, parmi lesquels Ignacio Churruca ou encore Ferrero, ses compères en attaque. Ils formeront un trio magique et marqueront ensemble près de 420 buts pour le club rojiblanco. Son frère Jesús, aux cages, compose aussi le onze. Reculer pour mieux sauter. Un séjour en deuxième division est bénéfique pour la bande à Quini. Finissant une nouvelle fois Pichichi, il permet au club asturien de finir champion et de remonter à l’été 1977.
De retour dans l’élite, Quini offre à son club les plus beaux résultats de son histoire. Pour conclure une belle année, les Rojiblancos atteignent leur deuxième demi-finale de Coupe du Roi où ils sont battus par Las Palmas. Un an après, lors de la saison 1978-1979, le Sporting Gijón vit l’une de ses plus belles saisons en finissant deuxième du championnat. Cette année-là, Quini remporte le Premio Don Balon, récompense adressée entre 1976 et 2010 aux meilleurs joueurs de Liga sur l’année. Il goûte aussi à la Coupe d’Europe pour la première fois avec la Coupe de l’UEFA et porte le club vers ses meilleures performances dans la compétition. Après avoir sorti le Torino en 32ème de finale, les Asturiens échouent en 16ème contre l’Etoile Rouge de Belgrade. Mais Quini ne compte pas s’arrêter là. La saison suivante, 79-80, il emmène Gijón à la troisième place du championnat et rafle de nouveau le trophée Pichichi, avec 24 buts marqués.
Après une nouvelle demi-finale de Coupe du Roi, la troisième depuis qu’il est au club et une défaite contre la Castilla, le temps est peut être venu pour el Brujo d’aller voir ailleurs. Douze ans ont passé depuis l’arrivée de Quini dans le club et l’envie de partir jouer dans une équipe plus compétitive, à la hauteur de son talent, se fait ressentir chez la star asturienne. Quatre ans plus tard, le Barça revient à la charge pour signer le meilleur buteur du championnat. Le club catalan propose une offre bien plus conséquente : 82 millions de pesetas. Après 215 buts en 380 apparitions et le sentiment du devoir accompli, celui qui était déjà rentré dans la légende du Sporting allait enfin quitter la maison. Il avait placé le club dans les plus hautes sphères du championnat et l’Europe avait appris à placer Gijón sur une carte. Un au revoir, mais certainement pas un adieu. A 31 ans, Quinigol débarque en Catalogne en juin 1980.
Barcelone, premiers succès et enlèvement
La Liga 1979-1980 s’est close avec le 20ème titre du Real Madrid, son troisième consécutif. La saison qui s’apprête à débuter est sans doute l’une des plus compétitives, avec des équipes toutes aussi fortes les unes que les autres. Le Real Madrid de José Antonio Camacho, Uli Stielike, Vicente Del Bosque, la Real Sociedad d’Arconada et du meilleur buteur de l’histoire du club Jesus Satrustegui, deuxième et invaincue durant 38 parties la saison précédente, le Valence de Mario Kempes, l’Atlético de Madrid et enfin le Barcelone d’Helenio Herrera, porté par leur nouvelle coqueluche en pointe. Ces deux dernières équipes se détachent rapidement du peloton et font la course en tête. Fin février, l’Atlético est leader. Juste derrière, le Barça est à deux points et les deux clubs doivent se rencontrer le week-end suivant. Soudain, une voix retentit…
« Nous ne voulons pas te faire de mal ». Ce sont les mots qu’entend Quini, enfermé dans cette lugubre cave depuis quelques instants. Un 3m2 humide, sombre, avec comme seul confort un matelas et de quoi y faire ses besoins. Les ravisseurs ont même aménagé un haut-parleur pour pouvoir communiquer avec lui. L’Espagne toute entière est sous le choc. Son attaquant vedette lui a été enlevé, et impossible de savoir si le pire n’est pas déjà arrivé. La nouvelle ne tarde pas à faire le tour des kiosques en Europe. Il faut dire que le pays ne vit pas ses heures les plus tranquilles. Quelques jours avant son enlèvement, des franquistes ont tenté un coup d’État. Le 6 février, l’ingénieur d’une centrale nucléaire, enlevé par l’organisation terroriste basque ETA, a été retrouvé mort. Néanmoins, la piste politique ou terroriste est rapidement écartée. Pendant ce temps, la police et les journaux reçoivent leurs premiers canulars. Un faux appel d’un individu anonyme revendiquant l’enlèvement en tant que représentant d’un « bataillon catalan-espagnol » rapporte que Quini devrait être libéré après le prochain match contre l’Atlético de Madrid, justifiant cet acte parce qu’ « une équipe séparatiste ne peut pas gagner la Liga ». Quelques heures plus tard, un autre message d’un groupe exige 350 millions de pesetas pour la libération du footballeur.
Les heures qui passent sont interminables. Toujours sans nouvelle, sa famille et ses coéquipiers au Barça sont effondrés. Mais le 3 mars, des premières consignes tombent. Les ravisseurs réclament 100 millions de pesetas. Les premiers contacts téléphoniques se font avec les proches du joueur. C’est l’un de ses meilleurs amis, le défenseur catalan Alexanko, qui est chargé de faire le lien quotidiennement entre les ravisseurs et la police. Tous les soirs, Alexanko joue le rôle d’intermédiaire aidant l’opérateur Telefonica à remonter l’origine des appels. Une tâche laborieuse à une l’époque ou le système téléphonique espagnol est majoritairement électromécanique.
Pendant ce temps, les joueurs du Barça refusent de jouer au football tant que Quini ne sera pas libéré. A quelques jours d’une rencontre décisive face à l’Atlético, les cadres comme Estella ou Bernd Schuster se révoltent. Ce dernier déclare « Je ne jouerai pas. À part des jambes, j’ai un cœur, et je veux seulement que revienne Quini ». Et l’Allemand ne dort plus. A tel point qu’il fait appel à un garde du corps pour le protéger. Mais la Fédération ne veut rien entendre, et le match se joue le 8 mars. Sans grande surprise, les Blaugranas sont défaits à Vincente Calderon sur le plus petit des scores. A leur retour à l’aéroport, près de 5000 supporters acclament leurs héros à l’aéroport sous les encouragements et des « ¡ Quini, libertad ! ». L’impact est trop important pour l’équipe qui ne s’entraine plus, ce qui se voit sur le terrain. Le 15 mars, le groupe est battu à Salamanca et tenu en échec une semaine plus tard contre Saragosse. Le titre semble s’envoler face à une concurrence qui ne se prive pas d’en profiter pour engranger des points.
Finalement, après des jours de négociations et de tentatives infructueuses pour remettre l’argent aux preneurs d’otage, ces derniers demandent que la somme soit déposée sur un compte en Suisse, à Genève. Après négociations, on convient que la rançon serait payée par un partenaire suisse du Barça (Omega), qui devait de l’argent au club catalan. Le 25 mars 1981, Jorge De Haro et deux de ses collègues de la police arrivent en Suisse, accompagnés de Nicolau Casaus, l’un des vice-présidents du Barça. La coopération entre la police suisse et espagnole permet de lever le traditionnel secret bancaire si précieux à la Suisse. A peine après avoir eu le temps de récupérer l’argent sur le compte, son propriétaire, Víctor Manuel Díaz Esteban, est identifié et arrêté à l’aéroport au moment où il s’apprête à quitter Genève pour Paris. L’homme est un électricien âgé de 26 ans, au chômage, et n’a certainement pas le CV d’un bandit ou d’un terroriste. Il ne tarde pas à indiquer à la police où est retenue la star espagnole. C’est à Saragosse que les forces de l’ordre se rendent pour libérer Quini. Dans une cave insalubre de la rue Jeronimo Vicens, ils découvrent un pauvre homme affaibli psychologiquement, avec une barbe de trois semaines, sale. Comme un symbole ce jour-là, l’Espagne vainc pour la première fois l’Angleterre à Wembley. Quand les planètes sont alignées… Les deux autres complices, Fernando Martin Pellejero et José Eduardo Sendino, deux mécaniciens, sont arrêtés sur le coup.
Le footballeur est traumatisé, fatigué et proche de la paranoïa. Il a pensé à plusieurs reprises au suicide. « J’ai entendu des bruits, une grande pagaille et, là, je me suis dit : “Enrique, c’est fini ». La trappe s’est ouverte et je tremblais de peur. J’ai vu un pistolet et j’ai pensé qu’on était venu me tuer. J’ai essayé de me protéger avec le matelas. L’homme m’a dit qu’il était policier, que je ne devais pas avoir peur. Mais j’ai eu du mal à croire que c’était vrai. » A son retour à Barcelone, le buteur est accueilli en héros par des milliers de supporters. Paradoxalement, il n’en tiendra jamais rigueur à ses ravisseurs qui n’ont jamais voulu lui faire du mal. Au chômage et complètement perdus, les trois malfrats voulaient simplement s’en sortir en empochant la rançon qu’ils demandaient. Comment auraient-ils pu s’en prendre à leur idole ? En grand seigneur, Quini retire sa plainte contre eux, ce que son club ne fera pas. La sentence tombe quelques mois plus tard : les trois hommes sont condamnés à 10 ans de prison et à verser 5 millions de pesetas à Quini. Somme qu’il refusera. Preuve qu’il était sans doute l’homme des plus appréciables, il accorde à ses ravisseurs son pardon immédiat. Quelques années plus tard, il en rencontrera un, avec qui il échangera pendant de longues minutes.
Le lendemain, Quini est déjà présent à l’entrainement. Un Clasico à jouer contre le Real arrive dans quelques jours. Pour son retour, Quini ne fera pas de miracle et Barcelone est sèchement battu 3-0. Sans surprise, le club catalan ne remportera pas la Liga. Pour beaucoup, cet enlèvement a brisé les rêves de titre. « L’affaire Quini nous a détruits » déplore à l’époque Helenio Herrera, l’entraîneur du Barça. L’Atlético ne profitera pas de son avance et à la grande surprise, la Real Sociedad remporte son premier titre de champion. Malgré tout, Quini finit une nouvelle fois meilleur buteur de la saison et s’adjuge un nouveau titre de Pichichi avec 20 buts. Même un enlèvement ne pouvait le stopper. Il remporte aussi son premier trophée collectif dans l’élite face à son ancienne équipe de Gijón, en finale de Coupe du Roi.
Une carrière restée sur sa faim
C’est logiquement avec le FC Barcelone que Quini obtient la majorité de ses titres collectifs. Le buteur reste trois années en plus sous le maillot blaugrana avec lequel il gagne une Coupe d’Europe des vainqueurs de coupe en 1982 contre le Standard de Liège, avec un but en finale. Il rafle une nouvelle fois le trophée Pichichi grâce à une saison prolifique à 26 buts. Le dernier de sa carrière. Et comme cela ne pouvait être que lui, il marque cette même année le 3000ème but du club en championnat. L’année suivante, il réalise un triplé en conquérant une nouvelle Coupe du Roi, la Coupe de la Ligue et la Supercoupe d’Espagne. Trophées qu’il partage avec un certain Diego Maradona, qui a rejoint le club en provenance de Boca Juniors. Malgré cette doublette et les buts à foison, Quini ne remportera jamais de championnat, un gros manque à son palmarès.
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Quini quitte le Barça à l’été 1984, à l’âge de 35 ans, pour finir sa carrière dans son club de toujours, le Sporting Gijón. Et comme d’un fait exprès, le Barça sera champion l’année suivante. Après trois ultimes saisons agrémentées de quelques buts, Quini raccroche les crampons. Il dispute le tout dernier match de sa carrière le 14 juin 1987 contre le Barça. Comme un symbole. Avec 219 buts marqués, il occupe aujourd’hui la huitième place des meilleurs buteurs de l’histoire du championnat espagnol.
Sa carrière en sélection est à l’image de sa carrière en club : incomplète. S’il participe aux Coupes du monde 1978 et 1982 et à l’Euro 1980, il ne remportera rien avec son pays. De sa carrière internationale, on ne retiendra que ses huit buts en 35 sélections dans une équipe d’Espagne qui était loin d’être le rouleau compresseur que nos contemporains ont connu. On pourra retenir aussi l’une des plus grandes blessures de sa carrière infligée lors d’un match contre l’Irlande du Nord en 1972. El Brujo ressortira de ce match la pommette gauche fracturée. Le coupable ? La légende aime raconter que Georges Best fut l’auteur du coup de coude ravageur, même si le véritable coupable semble être le rugueux défenseur Allan Hunter. Sans les images de l’action, difficile de démêler la réalité de la fiction. Quini mettra plusieurs mois à s’en remettre et manquera une partie de la saison 72-73. Il met un terme à sa carrière internationale à l’issue de la Coupe du Monde 1982. Deux ans plus tard, l’Espagne atteint la finale de l’Euro qu’elle perdra contre la France. Et qui sait ce qu’il aurait pu advenir si Quini avait foulé cette pelouse du Parc des Princes…
Septuple Pichichi, huitième meilleur buteur de l’histoire de la Liga et homme d’un seul club ou presque, Quini est l’incarnation de ce football romantique qui tend à disparaitre. « Ma vie est au Sporting et je sais que je veux seulement mourir ici » : malgré ses années barcelonaises, il ne cessera jamais de clamer tout son amour pour le club asturien. En choisissant l’amour plutôt que le prestige, Quini a accepté de laisser de côté les trophées. Souvent au mauvais endroit au mauvais moment, c’est ce qui peut résumer sa carrière et sa vie. Une vie qui aurait pu basculer vers le meilleur si la chance avait été plus de son côté. Mais le football se souviendra d’un buteur hors norme, capable de marquer de n’importe où. Véritable finisseur au sens du placement remarquable, il était déjà trop tard une fois que Quini était parti dans le dos de ses adversaires. Envoûtant, séduisant, noble et aux qualités humaines indéniables, Quini a inscrit sa légende dans le football espagnol. Il le lui rendra bien le 27 février 2018, le jour où el Brujo a disparu à tout jamais.
Sources :
- Furia Liga : Quini, le magicien a disparu
- Jot Down Cultural Magazine : El rastro de Quini
- L’Equipe : L’incroyable kidnapping de Quini, star de la Liga
- So Foot : Quini, la première disparition
Crédits Photos : Icon Sport