Le club sarthois du Mans FC a connu son âge d’or au cours des années 2000. Installé dans le paysage de la Ligue 1 entre 2003 et 2010, son projet s’est par la suite effondré. Choix sportifs et financiers trop ambitieux, c’est à la case DH que les Manceaux sont repartis en 2013. Désormais, le club, qui évolue en national, tente de se reconstruire dans l’espoir de retrouver les sommets.
Aujourd’hui coincé entre une équipe de basket hyper-compétitive et un circuit automobile reconnu à l’international, Le Mans F.C tente de se faire une place dans le paysage sportif sarthois. Le club, qui a connu son heure de gloire dans les années 2000, possède une histoire relativement récente. Né en 1985, il est le fruit de la fusion de deux équipes mancelles : l’Union Sportive du Mans et le Stade Olympique Du Maine.
A l’hiver 1984, l’USM, soutenue financièrement par la municipalité, est embourbée dans les bas-fonds de la 4ème division. Le SOM, quant à lui en 3ème division, voit ses sponsors locaux se retirer un à un, faute de résultats sportifs. Un homme, Roland Grandier, alors président du SOM, soumet à la municipalité un projet de fusion des deux clubs. Le but ? Unir les forces des deux associations au sein d’une même entité, capable de performer à long-terme au niveau professionnel. Le 12 juin 1985, le projet est entériné. Les deux équipes ne forment désormais qu’une seule et même formation : le MUC 72. Reprenant l’héritage laissé par le SOM, c’est en 3ème division que le club commence le championnat.
La première saison voit les Manceaux finir 10ème de leur championnat. Un résultat encourageant pour un club créé seulement un an auparavant. C’est alors que l’équipe voit arriver sur son banc un jeune tacticien ambitieux : Christian Gourcuff. Le Finistérien endosse pour sa première saison la casquette d’entraineur-joueur, et mène l’équipe à la deuxième place du groupe Ouest, à une marche seulement de la montée. Un objectif initial atteint dès l’année suivante par le club qui rejoint l’antichambre de la division 1 seulement trois saisons après sa création.
Au cours des années 90, le Mans se fond dans le paysage de la Division 2. Dix années pendant lesquelles le club alterne des résultats en dents de scie. En 1992, les Manceaux manquent l’accession à l’élite en s’inclinant contre Strasbourg lors des barrages, avant de se sauver in extremis l’année suivante, lors de la dernière journée.
Une stabilité affichée durant cette décennie, qui permet au club de viser plus haut. L’accession en Ligue 1 devient, à l’aube des années 2000, un objectif prioritaire pour le club. En 1999, ce dernier change de dimension. Après avoir été défait en demi-finale de Coupe de France, le MUC 72 voit arriver un nouvel entraineur : Thierry Goudet. Sous son égide, le club voit sa politique sportive changer, basant sa réussite sportive sur son centre de formation. A présent, les jeunes formés ou post-formés à l’académie Mancelle doivent être capables de mener les Sang et Or dans l’élite, et le maintenir au plus haut niveau.
2003-2010 : l’âge d’or du MUC 72
En 2003, après une saison très réussie en Ligue 2, le club accède à l’élite pour la première fois de son histoire. Une performance due à un projet cohérent et stable, mis en place par la direction Mancelle. Avec un centre de formation performant, le club a vu arriver dans son équipe des jeunes talents. Parmi eux : Laurent Bonnart, James Fanchone ou Fréderic Thomas. Une jeunesse dorée, bien décidée à s’installer dans l’élite du football français. Toutefois, pour ses débuts en première division, l’équipe subit la dure loi de l’apprentissage au plus haut niveau. Avec une seule victoire lors des 13 premiers matchs, et une équipe limitée sportivement, le club termine à la 19ème place et est relégué dès sa première saison en Ligue 1.
Le MUC prévoit alors des changements directionnels avec un objectif clair : retrouver l’élite. Henri Legarda est nommé président du directoire et place Frédéric Hantz au poste d’entraineur. Le Ruthénois, au management atypique, n’hésite pas à organiser des footings à 6h du matin, ou faire ses causeries dans le noir pour stimuler ses joueurs. Le pari est réussi. Au terme de la saison, le club retrouve l’élite après avoir accroché la 2ème place en Ligue 2.
La direction insiste alors sur l’importance des jeunes dans le 11. Désormais, la formation et la post-formation sont mises au cœur du projet. En quelques années, vont éclore des visages bien connus en Ligue 1 parmi lesquels Sébastien Corchia, Yohann Pelé ou encore Ludovic Baal. Ces jeunes pouces, accompagnés des cadres Manceaux, doivent maintenir le club dans l’élite.
Ce sera chose faite pendant cinq ans. Avec Frédéric Hantz sur le banc, le club enchaine, et se maintient au plus haut niveau du football français. Il mène le club aux 11èmes et 12èmes places dès ses deux premières saisons et réussit quelques coups d’éclats monumentaux en battant notamment l’OM (3-0) et le PSG (0-1) en 2005-2006. On assiste à cette période, à l’âge d’or manceau. Le MUC 72 semble stabilisé en première division et son projet l’a même mené deux saisons d’affilée aux portes de la finale en Coupe de la Ligue. C’est donc avec le sentiment du devoir accompli que Frédéric Hantz quitte le club à l’été 2007.
Au sommet de son histoire
Le 27 février 2008, le MUC 72 a l’occasion d’écrire la plus belle page de son histoire. Alors 5ème du classement, les Manceaux, dirigés par Rudi Garcia, réalisent tout simplement la meilleure saison de leur histoire. Une folle épopée en Coupe de la Ligue vient mettre un point d’orgue à cette saison dorée. Après avoir éliminé l’ogre Lyonnais en quart de finale, grâce à un but du Japonais Matsui, c’est toute la population Mancelle qui se voit déjà au Stade de France. Dernier obstacle sur le passage : le RC Lens, alors entrainé par Jean-Pierre Papin.
Dans un stade Léon Bollée plein à craquer, les Sang et Or sont à 90 minutes d’un exploit retentissant. Disposés en 4-2-3-1, les Manceaux affichent ce soir-là l’une des plus belles équipes de leur histoire. Yohann Pelé se tient en dernier rempart d’une défense composée des tauliers Basa et Cerdan, accompagnés sur les côtés par Jean Calvé et Ibrahima Camara. Au milieu, le capitaine Romaric est associé à Hassan Yebda. En ce qui concerne l’animation offensive, elle est confiée au quatuor Sessegnon-Matsui-Gervinho-De Melo. Ces 4 fantastiques sont chargés d’exaucer le vœu d’une population mancelle si désireuse de briller à l’échelle nationale.
A la mi-temps, le score est de parité. Le Mans aura mené par deux fois, avant de se faire rejoindre juste avant le retour aux vestiaires. En seconde période, c’est Lens qui s’envole. 4-2 pour les Nordistes à la 64ème. Puis deux minutes de folie. Deux minutes qui voient les protégés de Rudi Garcia revenir au score grâce à Daisuke Matsui et Tulio de Melo. 67ème minute : 4 buts partout. Les deux équipes joueront leur destin aux prolongations. Le sort est scellé à la 117ème lorsque le Lensois Sidi Keita allume Yohann Pelé des 25 mètres et qualifie son équipe pour la finale de la Coupe la Ligue. Triste épilogue d’une rencontre d’anthologie, qui marque pour le club manceau le début de la fin.
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Une lourde descente aux enfers
En 2010 après 5 saisons consécutives en Ligue 1, le MUC 72, 18ème à l’issue de la saison, est relégué en deuxième division. Une fin de parcours pour les Sarthois au sein de l’élite française, et un retour en Ligue 2, là où le club s’est illustré pendant une grande partie de sa jeune histoire.
Cette descente aux enfers a, pour nombre d’observateurs, commencé après la défaite en demi-finale de Coupe de la Ligue. En 2009, malgré une encourageante 9ème place au classement, le MUC 72 voit partir à l’été ce qui constituait sa colonne vertébrale. Rudi Garcia, en poste depuis un an, prend la direction du LOSC emmenant dans ses valises Gervinho et Tulio De Melo. L’équipe mancelle perd deux machines à marquer et les cadres de son vestiaire. Romaric et Sessegnon sont vendus mais pas remplacés. Des pertes donc, tant quantitatives que qualitatives et un effet sur les résultats sportifs qui se fait vite ressentir.
Le jeune effectif manceau (23 ans de moyenne d’âge) termine donc la saison 2009-2010 à la 18ème place et se voit relégué en Ligue 2. Un pas en arrière significatif, et un besoin vital de remonter dans l’élite dans les plus brefs délais. L’objectif est clair pour la direction mancelle : faire l’ascenseur dès la saison suivante. Malgré une 1ère place défendue une grande partie de la saison, le MUC rate le coche à la 37ème journée. Un match cauchemardesque contre le Vannes OC où les pensionnaires de Léon Bollée encaissent 3 buts dans le dernier quart d’heure, venant ainsi clore tout espoir manceau.
L’avenir s’assombrit donc pour la direction, qui, en proie à de sérieux problèmes financiers, voit la DNCG mener une enquête à son sujet. En cause notamment, une masse salariale trop élevée et des dépenses bien supérieures aux recettes du club. Affichant près de 7 millions d’euros de dettes, le président Legarda est dos au mur. Dans l’incapacité de payer ses joueurs, il annonce, en décembre 2012, être prêt à étudier les offres de reprise du club, condition sine qua none au maintien du club en Ligue 2. Au niveau sportif, la situation s’empire : le club conclut l’exercice à la 18ème place et se voit relégué en National.
Un projet ambitieux, avant le fiasco
« Intégrer le top 50 des clubs européens », déclarait le président Henri Legarda en 2009. L’homme d’affaire, enhardi par cinq saisons consécutives en Ligue 1 et trois demi-finales de Coupe de la Ligue en autant d’années, voit très grand pour son club. Le stade Léon-Bollée, jugé trop petit et vétuste fait figure de frein à la croissance du club. Dès 2005, le projet d’un nouveau stade voit le jour. Une enceinte moderne, entourée de complexes immobiliers et centres commerciaux, vient se poser en vitrine d’un projet ambitieux. Dans la Sarthe, la nouvelle est accueillie avec un certain enthousiasme. Un stade grandeur Ligue 1 pour un club destiné à jouer les premiers rôles dans les années à venir.
Ce projet est avant tout basé sur un modèle économique novateur : le naming. Pour la première fois en France, un stade de football sera baptisé par le nom de son sponsor. Le groupe d’assurance MMA rafle la mise et s’engage à verser un loyer d’un million par an, pendant 10 ans. Le reste des coûts, évalué à près de 100 millions d’euros, est partagé à travers un partenariat public / privé. Un consortium de collectivités territoriales et entreprise locales prennent en charge la construction du stade qui débute à l’été 2008.
Livrée en 2011, l’enceinte est inaugurée quelques mois après la descente du Mans Football Club en Ligue 2. Un coup dur pour le board manceau, qui misait sur les recettes des participations régulières en Ligue 1 pour pallier les coûts engendrés par le projet. Les coûts d’entretien et le loyer du stade dépassant largement les recettes d’un club de Ligue 2, il est obligatoire pour les Manceaux de retrouver l’élite.
En 2013, alors que le club est placé en liquidation judiciaire, la gestion du stade rentre au cœur des débats. Que faire d’une enceinte ultra moderne de 25 000 places quand le club évolue en DH ? Pendant quatre ans, ce stade, considéré comme un désastre économique, fut laissé à l’abandon. Utilisé ici et là pour accueillir des rencontres de gala, du rugby ou du football américain, il a dû attendre 2017 pour accueillir de nouveau ses protégés. Une longue période donc, où les Sang et Or évoluèrent dans leur centre d’entrainement, au Clos Fleuri.
Aujourd’hui en National, les joueurs sont de nouveau autorisés à fouler la pelouse du MMArena. Un stade qui sonne bien vide, avec une affluence moyenne de 3500 spectateurs. Un chiffre au-delà de la moyenne du championnat de National, mais en deçà des attentes du club. En cause notamment, le manque criant d’animation autour du stade les jours de match. Là où la plupart des clubs misent aujourd’hui sur la fan experience pour garnir leurs travées, le parvis du MMArena sonne bien creux les soirs de match. Un silence de cathédrale devant l’enceinte, sans buvette, ni stand de restauration. Certains en venant même à regretter l’ambiance, autrement plus festive des avant-matchs à Léon Bollée.
A la fin de la saison, le contrat de naming avec MMA s’arrêtera. Sur pied depuis près de 10 ans, ce projet de stade fait figure d’immense fiasco. Il est aujourd’hui nécessaire pour le club de trouver d’autres partenaires économiques. Le club étant incapable de subvenir à ces dépenses pharamineuses par des résultats sportifs dignes de ce nom.
Vers la renaissance du club ?
En 2013, le club voit sa dette exploser à 14 millions d’euros : une véritable faillite financière. L’institution est rétrogradée en CFA par la DNCG. Après une bataille juridique de près de 4 mois, le tribunal de Commerce du Mans prononce, le 15 octobre 2013, la liquidation judiciaire du Mans FC. Le club, qui a perdu son statut professionnel, se voit recommencer en bas de l’échelle, en division d’honneur.
Redescendu au niveau amateur, le club manceau doit tout reconstruire, à commencer par une équipe. Alors que le matériel sportif a été vendu aux enchères, et que la majorité des joueurs est partie, un groupe de quelques joueurs de l’équipe C est resté. Au sein d’une équipe bricolée, partant avec 6 défaites en autant de matchs, l’espoir subsiste. Au fil de la saison un groupe se crée, l’objectif de la montée en ligne de mire. Après une fin de championnat héroïque, le club obtient son ticket pour la CFA2 lors de la dernière journée. Une sacrée prouesse, et des joueurs héroïques, qui ont écrit les premières lignes d’une folle remontada.
Depuis 8 ans, Le Mans FC renait de ses cendres. Le club ambitionne, depuis 2016, et l’arrivée de Thierry Gomez comme président, de retrouver l’élite. Un projet loin d’être utopique, puisque le club a réussi en 2017, à rejoindre le National 2. Ce passage chez les semi-pros a permis au club de retrouver l’usage du MMArena, quatre ans après l’avoir quitté. Des supporters de retour, un semblant de ferveur retrouvé, et un club qui parait ressortir des abysses.
Point d’orgue de cette folle remontée, le 2 juin 2019. A l’issue d’une saison marquée par une 3ème place en national, Le Mans FC affronte en barrages le Gazélec Ajaccio. Après une défaite 1-2 au MMArena, les Sang et Or doivent gagner en Corse pour valider leur montée. Au terme d’un scénario fou, c’est l’attaquant manceau Mamadou Soro Nanga qui, d’un ciseau retourné à la 90’+7, envoie les siens en Ligue 2.
Un passage express dans l’antichambre de l’élite pour le club sarthois, qui a connu une redescente en National 1 dès la saison suivante. Le MUC, 19ème de Ligue 2 au soir du 9 mars 2020, a subi les conséquences de l’arrêt forcé des championnats de football suite à la pandémie du COVID-19.
Aujourd’hui, les Sang et Or peinent à retrouver des couleurs. L’éclaircie observée depuis quelques années semble se dissiper. Les Sarthois se trouvant aujourd’hui englués dans le ventre mou du championnat de National. Mis en difficulté économiquement par la pandémie, le club est à la recherche d’un repreneur. Il bénéficie néanmoins d’un coup de projecteur depuis l’arrivée sur le banc de Cris. L’ex-défenseur lyonnais peine néanmoins à faire décoller les résultats de son équipe.
L’objectif du club sur le long-terme est un retour en Ligue 1. A l’heure actuelle, les dirigeants sont à la recherche d’un projet économique viable. Des décisions qui doivent aller dans le sens du sportif, tout en prenant en compte la gestion du fiasco MMArena. Un stade, qui au delà d’être un fardeau, doit désormais servir les intérêts du club. « Le Mans a quitté le L1 à cause de son stade, il la retrouvera grâce à son stade » déclarait Frédéric Hantz en 2018. Reste désormais à savoir quand et avec quels moyens.
Même s’il n’a jamais joué les premiers rôles en Ligue 1, Le Mans FC n’en reste pas moins un club emblématique des années 2000. Avec trois demi-finales de Coupe de la Ligue et six saisons dans l’élite, le futur semblait radieux du coté de la Sarthe. Un projet semble-t-il trop ambitieux, des dirigeants qui se sont vus trop haut, trop rapidement ont mené le club à la liquidation judiciaire. Comme un phénix qui renait de ses cendres, les Sang et or se sont relevés et les supporters n’attendent qu’une chose : goûter de nouveau à la Ligue 1.
Sources :
- Entretien avec Antonin Gendry, « Le Muciste« , Chaine Youtube
- Benoit Pasteau, « Le Mans F.C, un naufrage économique« , Europe 1, 13 juillet 2013
- Clément Daniez, « Le Mans F.C : la chute d’un petit club qui se voyait en ligue des champions« , L’Express, 01/08/2013
- Michel Henry, « Comptes : Le Mans F.C complètement à l’Ouest« , Libération, 8 mars 2013
- Jean-Francois Monnier, « Cinq ans après sa liquidation, le club du Mans revient de l’enfer amateur« , Sud-Ouest, 18/05/2018
- Le Muciste « L’année DH, Le film 2013-2014« , Youtube, 6 avril 2020
Crédits photo : Icon Sport