Les années 70 restent peut-être à ce jour la période la plus brillante de l’histoire du football allemand. Le Bayern domine alors la Coupe des clubs champions européens (ancêtre de la Ligue des Champions) avec un triplé entre 1974 et 1976 et l’Allemagne redevient championne du monde lors de la Coupe du Monde de 1974 avec une ossature bavaroise. Cependant, un autre club maîtrise alors les débats en Bundesliga mais peine à s’imposer sur la scène européenne : le Borussia Mönchengladbach.
Ainsi, le club de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, ou « Ruhr » pour les locaux, est un club qui a connu de nombreux succès durant les années 70 avant de lentement sombrer jusqu’à la fin des années 2000. Ce dernier est aujourd’hui dans l’une des meilleurs périodes de son histoire et semble revenir en force sur la scène nationale après de nombreuses débâcles. Retour sur l’histoire d’un géant de Bundesliga.
Fondé en 1900, le « Fuβballklub Borussia 1900 » tient son appellation de la latinisation du mot « Prusse » qui devient alors « Borussia » : un nom populaire dans ce qui s’appelait alors encore le Royaume de Prusse. Le club change plusieurs fois de nom avant d’adopter définitivement le nom de « Borussia Verein für Leibesübung Mönchengladbach » ou Borussia Mönchengladbach sous forme simplifiée en 1961.
Le football allemand se joue à ses débuts à un niveau amateur dans des ligues régionales jusqu’en 1949 puis à un niveau semi-professionnel jusqu’en 1963, année durant laquelle débute la toute nouvelle Bundesliga créée l’année d’avant.
Débuts en Bundesliga et premiers succès
Il faut attendre 1965 pour voir le Borussia Mönchengladbach débarquer au plus haut niveau, aux côtés d’un certain Bayern Munich promu la même année, grâce à une équipe composée de jeunes joueurs tel que Jupp Heynckes ou Bernd Rupp. L’équipe a alors une moyenne d’âge d’un peu plus de 21 ans, ce qui lui vaudra le surnom « Die Fohlen » (les poulains) par son entraîneur emblématique, Hennes Weisweiler.
Si les débuts en Bundesliga sont laborieux, les bons résultats ne tardent pas à arriver. Toutefois, le club peine à retenir dans ses rangs ses meilleurs éléments dont les salaires explosent. Le club finit malgré tout deux fois 3ème du championnat en 1968 et 1969 grâce à un jeu offensif et alléchant qui sait mettre en valeur les qualités des jeunes joueurs du club. Le club manque cependant d’expérience et durant la saison 1969-1970, Hennes Weisweiler intègre à l’équipe des défenseurs expérimentés tel que Luggi Müller ou encore Klaus-Dieter Sieloff. Ces nouveaux éléments permettent aux Prussiens d’avoir de réelles garanties défensives et pour la première fois le club bat le Bayern Munich, avant de prendre la tête du championnat que le club ne lâchera plus jusqu’à son sacre le 30 Avril 1970, face au Hamburger SV.
Le club découvre alors l’Europe mais s’inclinera en huitièmes de finale contre l’Inter sous fond de polémique. En effet, lors du match aller à Mönchengladbach, alors que les Allemands mènent 2-1 à la 29ème minute sur des buts de Heynckes et Le Fèvre, une boite de conserve est lancée sur Boninsegna, le buteur intériste. Celui-ci s’effondre et sort du terrain sur civière malgré les protestations des joueurs de Gladbach qui crient à la simulation. Les Italiens semblent alors perdre leur concentration et les Westphaliens en profitent pour inscrire trois buts de plus avant la mi-temps. Le club italien procède alors à un deuxième remplacement à la mi-temps, celui de son gardien. Toutefois, la mauvaise fortune frappe et ils sont contraints à nouveau de faire sortir une seconde fois un joueur sur blessure lors de la seconde période, leur milieu Jair. Le règlement de l’époque n’autorisant que deux changements par équipe, les intéristes se retrouvent alors à 10. Malheureusement, le sort s’acharne et à 5 minutes avant la fin du match, l’exclusion de Corso pour avoir poussé l’arbitre achève l’Inter. Netzer et Klaus-Dieter Sieloff en profitent pour enfoncer le clou et offrent une victoire écrasante de 7-1 à Mönchengladbach.
Les joueurs du Borussia accusent Boninsegna de simulation en arguant que la boite de conserve était déjà sur le terrain avant qu’il ne s’écroule. L’Inter quant à elle dénonce les tentatives d’intimidation sur et en dehors du terrain des Allemands et réclame une victoire par forfait à l’UEFA par 2 ou 3 buts d’écart. L’instance européenne tranche finalement dans le vif en annulant le résultat du match et en demandant que le match soit rejoué sur terrain neutre, ailleurs en Allemagne.
Le match aller est donc rejoué juste après le match retour à Milan, ce dernier se soldant par une défaite (4-2) du Borussia Mönchengladbach. Le match rejoué se dispute à Berlin devant près de 84000 personnes au Stade Olympique mais les poulains, toujours malchanceux, perdent leur meilleur défenseur, Müller, sur blessure. Ils ratent ensuite un penalty. La rencontre se solde finalement par un match nul et permet donc aux Italiens de se qualifier avec un score de 4-2 cumulé sur les deux rencontres. Ces derniers atteindront même la finale cette année-là contre les tenants du titre, l’Ajax Amsterdam.
Si l’épopée européenne prend fin pour le club allemand, ce dernier parvint néanmoins à garder son titre de champion lors de la dernière journée cette saison-là face au Bayern Munich, encore une fois.
La rivalité entre les deux clubs explose lorsque le Bayern prend le dessus et entre à son apogée en s’adjugeant les 3 titres suivants en 1972, 1973 puis 1974. Le club bavarois domine également la scène européenne avec 3 titres en Coupe des clubs champions en 1974, 1975 et 1976.
Durant cette même période, le Borussia Mönchengladbach, quant à lui, remporte la coupe d’Allemagne face à Cologne en 1973, atteint la finale de la coupe UEFA (ancêtre de l’Europa League) la même année mais s’incline finalement face à Liverpool.
Le Bayern domine alors sans partage sur le plan national et européen mais les Westphaliens ne se laissent pas abattre et préparent leur retour sur le devant de la scène.
Apogée et déclin
La saison 1974-1975 marque alors un tournant dans l’histoire du club puisqu’il parvient à mettre fin à la domination du Bayern en remportant le championnat mais aussi en remportant la coupe de l’UEFA face au FC Twente, réalisant ainsi le doublé coupe européenne-championnat. Hennes Weisweiler s’envole alors pour le FC Barcelone et est remplacé par Udo Lattek. Dans la lignée de son prédécesseur, celui-ci garde le style offensif caractéristique de Weisweiler et permet au club de remporter le championnat les deux années suivantes en 1976 et 1977, réalisant ainsi le triplé. Le club atteindra même la finale de la Ligue des Champions en 1977 mais s’inclinera à nouveau face au légendaire Liverpool de Bob Paisley et Kevin Keegan. Allan Simonsen sera tout de même sacré Ballon d’Or 1977 et reste à ce jour le seul joueur du club ayant gagné ce prix et le premier et unique Danois à l’avoir gagné.
La période demeure prospère pour le club qui remporte malgré tout une deuxième Coupe de l’UEFA en 1979 face à l’Etoile Rouge de Belgrade et atteint la finale l’année suivante, avant de s’incliner dans un duel 100% allemand face à l’Eintracht Francfort.
Le début des années 80 marque cependant la fin de son apogée. En effet, les années qui suivent sont témoins du départ de nombreux cadres du vestiaire ainsi que dans la direction. Ces départs amorcent un lent déclin jusqu’au milieu des années 90. Les performances des joueurs, en chute libre, affaiblissent profondément le club et très vite des problèmes financiers se font ressentir malgré des victoires en Coupe d’Allemagne en 1984 et 1992. La médiocrité des résultats de l’équipe ne permettra au club de revenir au plus haut niveau allemand qu’à la fin des années 2000.
C’est sous l’impulsion de l’ancien joueur et légende du club Jupp Heynckes puis de l’emblématique coach Suisse Lucien Favre, qui lancera des talents tel que Marco Reus ou encore Marc-André ter Stegen, que l’équipe retrouve de belles couleurs et demeure, le troisième club le plus titré en Bundesliga derrière le Bayern Munich et le Borussia Dortmund.
In fine, le Borussia Mönchengladbach est un des plus grands clubs de l’histoire de la Bundesliga. Troisième équipe la plus titrée du championnat avec 5 Bundesliga, elle reste une référence du football allemand et européen des années 70 avec 2 Coupes de l’UEFA (C3) et 3 Coupes d’Allemagne. Il demeure néanmoins un club représentatif de sa région qui a subi de nombreuses épreuves après la réunification allemande de 1989. Les difficultés financières et la chute des performances sportives ont failli avoir raison de son existence, mais à l’image du football allemand, le club semble revivre depuis une dizaine d’année et notamment grâce aux retombées de la Coupe du Monde en Allemagne, en 2006. L’histoire du Gladbach ressemble à celle de nombreux clubs dans sa région en Westphalie, comme celle du Borussia Dortmund en proie aux mêmes difficultés aux débuts des années 2000. Elle n’en reste néanmoins pas moins inspirante et démontre la force de caractère si caractéristique de nos voisins germains.
Crédits photos: Iconsport
Sources:
- Site officiel du Borussia Mönchengladbach – Chiffres et dates clés – Histoire du Club
- Site officiel de la Bundesliga – La rivalité entre le Borussia Mönchengladbach et le FC Bayern
- Rheinische Post Online – Borussia Mönchengladbach: Der Bökelberg – ein Stadion, das Geschichte ist
- FRITZ THE FLOOD BLOG – European Cup 1971 1972 Inter Milan Borussia Monchengladbach Replay and Second Leg
- Documentaire sur le 8ème de finale de Coupe d’Europe 1971-1972 contre l’Inter Milan
- Wikipédia: Borussia Mönchengladbach – Ligue des Champions de l’UEFA – Ligue Europa