Anciens vainqueurs ou finalistes de la plus prestigieuse compétition continentale, ces clubs sont désormais des anonymes. La réforme de la C1 pour la lucrative Champion’s League et l’arrêt Bosman ont pesé sur leur parcours européen. Hormis Porto en 2004, aucun autre « petit » club n’a plus réussi à soulever la Coupe aux grandes oreilles et le spectre de la Super League ne va pas arranger ce phénomène. Retour sur ces ex-vainqueurs désormais portés disparus sur la scène européenne et sur ces finalistes qui, en plus, ont eu la désagréable expérience d’être définitivement passés à côté du Graal européen …
Les années 80
Nottingham Forest (1980)
L’équipe de Nottingham Forest conserve son titre
Qualifié en qualité de tenant du titre, Forest va réaliser un incroyable back-to-back l’année suivante. Avant d’affronter le Hambourg du double Ballon d’Or Kevin Keegan, le club de Brian Clough va bénéficier d’un parcours relativement aisé jusqu’en demi-finale. Par rapport à la saison précédente, l’effectif ne connaît quasiment aucun mouvement et le manager anglais conserve donc l’ossature de son équipe auréolée de succès quelques mois auparavant. Le sort est clément pour le premier tour avec Östers IF. Une opposition suédoise facilement effacée grâce à une victoire en Angleterre et un résultat nul en Scandinavie. Ensuite, les Roumains de Argeș Pitești perdent à l’aller et au retour pour offrir un ticket vers les quarts de finale. Si le BFC Dynamo fait des frayeurs à Clough et aux fans en s’imposant City Ground, les Britanniques remettent les pendules à l’heure à Berlin et valident leur place pour le dernier carré à la suite d’un large succès en Allemagne de l’Est. Le gros morceau arrive en demi-finale contre l’Ajax Amsterdam. Face à des Bataves ultra offensifs et déjà auteurs de trente buts dans la compétition, les Anglais ont un adversaire redoutable face à eux. Mais ils gardent leur cage inviolée à domicile et s’imposent au City Ground. Un avantage intéressant qui s’avère suffisant au retour puisque Forest résiste en dépit d’une courte défaite aux Pays-Bas.
De retour en finale un an après son succès, Nottingham ne fait pourtant pas office de favori. Son adversaire est le club allemand de Hambourg de Branko Zebec où évolue Manfred Kaltz, Horst Hrubesch, Felix Magath et l’Anglais Kevin Keegan. Une équipe très offensive qui a retourné en demi-finale le Real Madrid 5-1 au Volksparkstadion après une défaite en Espagne. Forest prend rapidement les devants et ouvre le score par Robertson à la 19e et laisse ensuite le ballon aux Allemands. John McGovern déclare au site de l’UEFA : « On a rapidement pris le rythme. Keegan était légèrement frustré car en deuxième période, alors qu’on menait 1-0, on a beaucoup reculé. » Il ajoute : « Ils avaient la possession du ballon mais l’équipe entière parvenait à annuler leur dernier geste ou Peter Schilton repoussait leur frappe. » Le capitaine anglais a bien résumé la situation. Incapables de tromper l’infranchissable Peter Shilton malgré une tentative de Manni Kaltz repoussée par la barre, les Allemands se cassent les dents sur la défense et la tactique mise en place par Clough. John McGovern peut soulever le trophée dans le ciel madrilène et raconte avec malice : « Clough aimait la discipline mais même lui n’a pas réussi à arrêter le Champagne de couler dans les vestiaires dans une telle occasion. » Avec ce deuxième sacre consécutif, l’équipe des Midlands devient le premier club à remporter plus de C1 que de titre national. Par la suite, Nottingham rentre dans le rang et rétrograde lentement mais sûrement dans la hiérarchie anglaise. Englué en Championship depuis le début des années 2000, le club ne parvient pas à retrouver les sommets.
LIRE AUSSI : Nottingham Forest à la fin des années 1970, l’apogée d’un club aujourd’hui oublié
Aston Villa (1982)
Dennis Mortimer, capitaine des Villans
Vainqueur de leur septième titre national en 1981 après une attente de soixante-et-onze ans, Villa participe pour la première fois à la Coupe des Clubs Champions. Et quelle première ! Le club de Birmingham réalise un exploit en remportant la vingt-septième édition de la compétition. Mais avant de se hisser en finale, les Anglais commencent leur épopée par Valur Reykjavik. Les modestes Islandais prennent la foudre avec une défaite cumulée de 7-0. Les huitièmes de finale contre le BFC Dynamo sont plus difficiles avec une qualification obtenue grâce à la règle du but à l’extérieur. Juste avant les quarts de finale contre le Dynamo Kiev, Villa connaît un véritable séisme avec la démission surprise de son manager Ron Saunders remplacé par Tony Barton. Malgré ce changement d’entraîneur, les Soviétiques s’avèrent cependant incapables de résister aux Villans qui valident leur ticket à domicile. Contre Anderlecht, la différence se fait également à l’aller à Villa Park et les coéquipiers de Dennis Mortimer prennent la direction de Rotterdam où ils retrouvent un ogre européen : le Bayern Munich.
En plus du désavantage lié à l’inexpérience, un coup du sort majeur va impacter la finale côté anglais. Le gardien de but vétéran Jimmy Rimmer se blesse au bout de neuf minutes et doit céder sa place au néophyte Nigel Spink, seulement deux apparitions au compteur. Le nouveau portier va réaliser un match extraordinaire en repoussant les nombreuses tentatives allemandes. Aston Villa tient le choc et ouvre le score en seconde période par White (1-0). Deux autres buts sont marqués de chaque côté mais sont annulés pour hors-jeu. Les Villans assurent en dépit des attaques munichoises et tiennent bon pour s’adjuger le trophée. Il s’agit du sixième titre consécutif pour un club anglais. Depuis ce triomphe, le club n’a plus disputé le tournoi européen et connaît même un passage en Championship de 2016 à 2019. De retour en Premier League, le club assure son maintien avec plus ou moins de marge sur la zone rouge et continue son redressement avec peut-être une future participation en coupe d’Europe via la nouvelle Conference League ?
LIRE AUSSI : Aston Villa, glorieuses années 1980
Hambourg (1983)
Le capitaine Horst Hrubesch et l’unique buteur du match Felix Magath
Finaliste malheureux en 1980, le HSV parvient à nouveau au dernier round de la compétition continentale après avoir éliminé le BFC Dynamo, Olympiakos, Dynamo Kiev et enfin la Real Sociedad. Challenger face à la Juventus de Michel Platini où sont également présents six membres de la Nazionale (Dino Zoff, Claudio Gentile, Gaetano Scirea, Antonio Cabrini, Marco Tardelli, et Paolo Rossi) championne du monde un an auparavant, l’équipe de Ernst Happel doit en plus faire face à l’absence de l’un de leur meilleur joueur Jimmy Hartwig. Pour empêcher le stratège français de déployer son jeu, le coach autrichien lui colle sur le dos Wolfgang Rolff et demande à sa défense de jouer le piège du hors jeu.
Le scénario du match tourne en faveur des Allemands avec l’ouverture précoce de Magath à la neuvième minute. La Juve bute sur cette défense incontournable. Après la défaite en 1973, les Italiens subissent un nouveau revers en finale dix ans plus tard. Avec ce succès, Hambourg met un terme à la suprématie anglaise mais ne dispute plus qu’à deux autres reprises la Champion’s League en 2000/01 et en 2006/07. En 2017/18, les Rothosen descendent en Buli 2 pour la première fois de leur histoire. Incapables pour le moment de remonter parmi l’élite, le HSV est actuellement bien positionné (deuxième) pour retrouver la Bundesliga.
LIRE AUSSI : Traditionsvereine (4/4) : La chute du Dino
Steaua Bucarest (1986)
Pichi Alonso rate son penalty face à Helmuth Duckadam
Suite au drame du Heysel survenu l’année précédente, tous les clubs anglais sont exclus des compétitions européennes pendant cinq ans. Cela laisse le champ libre à d’autres nations. Et le Steaua va bénéficier de cette absence. Pour leur sixième participation à la compétition, les Roumains s’élèvent jusqu’en finale après avoir sorti Vejle, Budapest Honvéd, Kuusysi Lahti et Anderlecht. Ils y affrontent un grand d’Espagne qui totalise dix titres de champion et une finale de C1 en 1961, perdue contre Benfica. Le Barça a l’avantage de disputer cette dernière manche en Espagne, à Séville, au Sánchez-Pizjuán et ses fans ont largement fait le déplacement en Andalousie. Cependant, les Belodedici, Lăcătuș, Pițurcă ou Bölöni ne se laissent pas intimider. Les Roumains tiennent en échec les Blaugrana. La prolongation ne change rien. Il faut en passer par la séance des tirs au but. Un joueur va particulièrement s’illustrer. Il s’agit du gardien Helmuth Duckadam. Le portier des roșu-Albaștrii repousse toutes les tentatives catalanes plongeant trois fois d’affilée à droite, et une fois à gauche et est, avec Belodedici, l’un des grands artisans de cette victoire surprise.
Le journal L’Equipe ne s’y trompe pas dans son édition du lendemain titrant : « Le Steaua est rentré dans l’Histoire« . Premier vainqueur issu du Bloc de l’Est, les joueurs du Steaua touchent une prime de victoire équivalente à sept années de salaire d’un haut fonctionnaire roumain. Après ce succès, Bucarest continue d’être actif sur la scène européenne dans les années 90. En 1998, la section football du CSA Steaua București se sépare du club polysportif de l’armée. Il devient un club privé et change son nom en Fotbal Club Steaua București. Mais en 2014, la Haute Cour de cassation et de justice invalide la privatisation. Le club perd le droit d’utiliser les marques historiques du Steaua, tout en parvenant temporairement à conserver le nom. L’affaire rebondit en 2017 quand la Haute Cour de cassation et de justice interdit l’utilisation du nom historique. Le FC Steaua București doit à nouveau changer son nom officiel et devient le Fotbal Club FCSB.
LIRE AUSSI : Steaua Bucarest 86, à jamais les premiers
FC Porto (1987)
Rabah Madjer et sa talonnade décisive
Pour cette trente-deuxième édition de la Coupe des Clubs Champions, le Portugal ramène le trophée dans la péninsule ibérique après le double succès du Benfica dans les années 60. Cette fois, c’est Porto le lauréat. Le Rabat Ajax, le FC Vítkovice, Brøndby et le Dynamo Kiev de Belanov et Blokhine subissent la loi des lusitaniens. À Vienne, ils affrontent le Bayern Munich de Matthäus. Le géant allemand domine grâce à sa puissance athlétique. Ils confisquent le ballon et ouvrent le score par Kögl (1-0). Mais Os Dragões renversent la vapeur dans le dernier quart d’heure. L’attaquant algérien Rabah Madjer marque l’un des plus beaux buts de la compétition. Dos au but, il reprend d’une talonnade un centre de la droite et égalise (1-1). Ce geste insensé porte par la suite son nom, une « Madjer ». Victime d’une blessure au mollet, Madjer sort quelques instants avant de rentrer de nouveau sur la pelouse (plus de remplacement possible) et délivre quelques instants plus tard une passe décisive pour Juary (2-1).
Le club portugais atteint la demi-finale en 1994 et les quarts en 1995, en 1997 et en 2000. C’est la seule équipe de la liste à avoir remporté à nouveau le trophée depuis l’arrêt Bosman. En 2004, après avoir gagné la Coupe de l’UEFA l’année précédente, Porto atteint une nouvelle fois le toit de l’Europe. Sous la direction d’un jeune manager en devenir, José Mourinho, l’équipe du président Pinto da Costa surclasse Monaco (3-0) à la Veltins-Arena de Gelsenkirchen. Avant d’en arriver là, les coéquipiers de Deco sortent du groupe F avec le Real Madrid. Puis, ils éliminent Manchester United, l’Olympique lyonnais et le Deportivo La Corogne. Le résultat final est assez cruel pour les Monégasques qui avaient réalisé un super parcours notamment en quart de finale contre le Real. Depuis, les Portugais (spécialisés dans la TPO : tierce propriété) ont encore eu quelques beaux parcours. Sans néanmoins réussir à rejoindre le dernier carré.
PSV Eindhoven (1988)
Wim Kieft et Ronald Koeman
Triple champion des Pays-Bas en titre, le PSV est réputé pour son football offensif et spectaculaire. L’équipe de Guus Hiddink est composée de joueurs néerlandais expérimentés (van Breukelen, Koeman, van Aerle, Vanenburg ou Kieft) renforcés par Eric Gerets, Søren Lerby et Frank Arnesen. Mais ce football offensif ne va pas se matérialiser en Europe où les Boeren vont plutôt être saluer pour leur solidité défensive. Et fait inédit dans la compétition, ils vont remporter le titre en ne remportant aucun match à partir des quarts de finale. La différence se fait à chaque fois à l’aller (1-1 contre Bordeaux et le Real) et ensuite, les Bataves tiennent le score au retour (0-0).
Et c’est également le score final à Stuttgart face à Benfica au terme d’une rencontre pauvre en spectacle et en intensité, considérée comme l’une des plus ennuyeuses de l’histoire de la compétition. La prolongation ne change rien et il faut attendre la séance de tirs au but pour connaître le vainqueur. Sur les conseils de Jan Reker, un des entraîneurs de Eindhoven, van Breukelen stoppe la tentative de Veloso (6-5 tab). La malédiction de Guttmann est encore d’actualité pour les Lisboètes. Troisième représentant néerlandais à remporter le titre, le PSV retrouve les demi-finales en 2005 mais cela reste à ce jour le meilleur résultat du club.