Anciens vainqueurs ou finalistes de la plus prestigieuse compétition continentale, ces clubs sont désormais des anonymes. La réforme de la C1 pour la lucrative Champion’s League et l’arrêt Bosman ont pesé sur leur parcours européen. Hormis Porto en 2004, aucun autre « petit » club n’a plus réussi à soulever la Coupe aux grandes oreilles et le spectre de la Super League ne va pas arranger ce phénomène. Retour sur ces ex-vainqueurs désormais portés disparus sur la scène européenne et sur ces finalistes qui, en plus, ont eu la désagréable expérience d’être définitivement passés à côté du Graal européen…
Feyenoord Rotterdam (1970)
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Dans la seconde moitié des années 60, le Feyenoord Rotterdam, sous la direction du technicien autrichien Ernst Happel, constitue une équipe compétitive composée de joueurs tels que Rinus Israël, Wim Jansen, Coen Moulijn ou Willem van Hanegem. Champion en titre en 1969, les Bataves entrent facilement dans la compétition avec un premier tour contre les modestes Islandais du KR Reykjavik étrillés 2-12 à l’aller et 4-0 au retour. À noter que les deux rencontres se déroulent au De Kuip à cause de la non-homologation de l’enceinte du club nordique. L’opposition se corse quand les Néerlandais héritent de l’AC Milan en huitièmes de finale. Face au vainqueur de l’épreuve en 1963 et tenant du titre, Feyenoord fait office d’outsider, d’autant que le club de Rotterdam a toujours perdu contre des équipes plus huppées comme en 1961 contre Tottenham, en 1963 face à Benfica et en 1965 opposé au Real Madrid. A San Siro, futur stade de la finale, la défaite concédée à cause d’un but du franco-argentin Nestor Combin semble s’inscrire dans cette tendance. Pourtant, au match retour, dans un stade plein à craquer, De club van het volk (« le club du peuple » en VF) brise ce plafond de verre et renverse les Rossoneri de Kurt Hamrin, Gianni Rivera et Giovanni Trapattoni. Jansen ouvre rapidement le score à la 6ème minute et van Hanegem permet à son équipe de passer en quarts.
Comme au tour précédent, le Vorwärts Berlin s’impose à domicile, mais l’avantage s’avère insuffisant. Des buts de Kindvall et Wery au match retour suffisent au Feyenoord pour atteindre le dernier carré. Contre le Legia Varsovie, les Néerlandais gardent leur cage inviolée en Pologne. De bonne augure avant le retour. C’est van Hanegem qui se charge de donner l’avantage à son équipe après seulement trois minutes de jeu. Les Polonais ne parviennent pas à égaliser et concèdent même un second but à la 30ème minute. Un avantage définitif pour les hommes de Ernst Happel.
En finale, De Trots van Zuid (« la fierté du sud » en français) livre un âpre combat face à un Celtic favori puisque vainqueur de la coupe trois ans auparavant. En dépit de ce statut, les Écossais sont surpassés tactiquement même si l’ouverture du score de Gemmel pour les Lions de Lisbonne peut être trompeuse. Cependant, cet avantage n’est que de courte durée. Israël égalise seulement deux minutes plus tard. Le technicien autrichien musèle l’ailier du Celtic Jimmy Johnstone en demandant à ses joueurs de le marquer systématiquement à deux. Ce marquage serré combiné à la domination des milieux de terrain bataves Wim Jansen, Franz Hasil et Willem van Hanegem, empêchent les joueurs de Glasgow de développer leur jeu offensif.
Si le Celtic conserve le nul et pousse son adversaire en prolongation, un lob astucieux du Suédois Kindvall suite à une erreur de jugement du capitaine britannique Billy McNeill offre la victoire au Feyenoord qui devient le premier club néerlandais à soulever la coupe aux grandes oreilles. Le lendemain, des centaines de milliers de personnes affluent vers l’artère principale de la ville, le Coolsingel, pour saluer les héros. À la suite de cet exploit, le club de Rotterdam remporte également la Coupe Intercontinentale l’année suivante et la Coupe de l’UEFA en 1974 et 2002. Cependant, ils ne parviennent plus à s’illustrer, ni en Coupe des clubs champions ni en Champion’s League. L’une des raisons principales de ces échecs est la chute au sein de la hiérarchie nationale au profit de ses rivaux de l’Ajax Amsterdam et du PSV Eindhoven. D’ailleurs, depuis 1970, Feyenoord n’a glané que six titres en Eredivisie contre vingt-et-un pour le club amstellodamois et vingt pour les Boeren.
Panathinaïkos (1971)
Pour cette seizième édition, deux nouvelles règles font leur apparition. Dorénavant, la règle du but à l’extérieur est étendue à toute la compétition. Pas seulement aux deux premiers tours. Et si les équipes ne sont pas départagées par cette règle, il faut désormais en passer par des tirs au but au lieu du tirage au sort avec la pièce. Everton devient donc le premier club à s’imposer après cette épreuve suite à deux résultats nuls et élimine Mönchengladbach en huitièmes de finale grâce à cette nouveauté.
Dans un championnat grec dominé par l’Olympiakos, qui détient déjà dix-sept couronnes nationales en 1967, le Panathinaïkos réussit pourtant à glaner plusieurs titres dans les années 60. Vainqueur du championnat pour la dixième fois en 1970, le Pana dispute donc la Coupe des clubs champions l’année suivante. Dirigés par l’ancienne idole du Real Madrid, triple vainqueur de la C1, Ferenc Puskás, les Grecs initient leur campagne européenne par un duel face à La Jeunesse d’Esch. Un tour facilement passé après une victoire au Luxembourg et un large succès à domicile avec un quadruplé de Antoniadis.
Au tour suivant, les Hellènes battent tranquillement le Slovan Bratislava au Leoforos et s’offrent le luxe de perdre en Tchécoslovaquie sans hypothéquer leurs chances de qualification. Opposés ensuite à Everton, les joueurs du « Major Galopant » obtiennent un bon résultat nul à Goodison Park où Antoniadis inscrit un but très important pour le match retour. Solide en défense, le Panathinaïkos préserve sa cage des attaques anglaises à domicile et valide son ticket pour la demi-finale grâce à la règle des buts à l’extérieur. Mais l’obstacle pour parvenir en finale est costaud. L’Étoile Rouge de Belgrade est un adversaire de taille. Les Yougoslaves s’imposent largement au Marakana devant une affluence folle de cent mille spectateurs grâce notamment à un triplé de Ostojić. Malgré la défaite, Kamaras entretient l’espoir en marquant un but à l’extérieur. En Grèce, si les chances sont minces, le Pana joue le coup à fond et démarre le match sur les chapeaux de roue. Antoniadis marque après seulement deux minutes de jeu, il double le score en deuxième période. Un but suffit pour qualifier l’équipe de Puskás. Il intervient peu après l’heure de jeu quand Kamaras trompe Dujković. L’équipe grecque obtient son billet pour la finale à nouveau grâce à la règle des buts à l’extérieur.
Cette finale à Wembley constitue une première pour un club hellène. Face à lui, l’Ajax et son football total basé sur une grande mobilité, un pressing intensif et sur un concept révolutionnaire : »Tout le monde attaque, tout le monde défend ». L’équipe de Johan Cruyff, Wim Suurbier et Johan Neeskens domine le début du match et trouve vite l’ouverture. Suite à une grande ouverture depuis le milieu du terrain vers le côté gauche, Piet Liezer se débarrasse de Kamaras et dépose le ballon du gauche sur la tête décroisée de van Dijk. Dominateur, Amsterdam manque plusieurs fois des occasions de tuer la rencontre avant la pause et laisse le Pana dans le match. Bien que Rinus Michels insuffle du sang neuf avec deux remplacements dès la reprise, le Panathinaïkos montre un visage plus batailleur en deuxième mi-temps.
Cependant, les Grecs ne réussissent pas à recoller au score. Et sur une action initiée côté droit par Johan Cruyff, le centre-tir de Haan dévié dans son propre but par Vlachos trompe Ikonomopoulos. Les Bataves scellent donc le sort de cette partie à la 87ème minute. Chaque équipe a eu sa mi-temps et le coach Hongrois déclare même à l’issue de la rencontre : « le Panathinaikos a joué pendant soixante-dix minutes un football brillant mais ne s’est pas remis d’un départ catastrophique ». Petite consolation pour Antonis Antoniadis, sacré meilleur buteur de cette édition avec dix réalisations devant l’Espagnol Luis Aragonés et les deux Yougoslaves Zoran Filipović et Stevan Ostojić.
Par la suite, l’équipe au trifylli dispute régulièrement les différentes compétitions européennes (Coupe des champions, Coupe des coupes et Coupe de l’UEFA). En 1996, ils atteignent même le dernier carré de la Ligue des champions mais sont éliminés par une vieille connaissance… l’Ajax. Incapables de faire face à la domination de l’Olympiakos sur la scène nationale, ils n’ont plus remporté de titre depuis 2010.
Ajax Amsterdam (1971,1972,1973)
Au début des seventies, les coéquipiers de Johan Cruyff vont imposer leur loi et leur « football total » à toute l’Europe. Comme vous venez de le lire ci-dessus, la première victime est le Panathinaïkos. L’année suivante, le technicien roumain Ștefan Kovács succède à Rinus Michels parti au FC Barcelone et s’appuie délibérément sur l’héritage de l’entraîneur batave. Il poursuit le football total de son prédécesseur et le perfectionne en donnant plus de liberté créative à ses joueurs. Contre le Dynamo Dresde, le tenant du titre soigne son entrée par une victoire à domicile et un nul en Allemagne de l’Est. L’Ajax poursuit son parcours en écartant facilement l’OM de Carnus, Bosquier, Zvunka, Gress, Magnusson et Skoblar. Malgré une chaude ambiance au Vélodrome et un but marseillais inscrit par Gilbert Gress, Cruyff va hisser son niveau de jeu et offrir un récital pour arracher la victoire. Les chances françaises, déjà compromises à l’aller, s’éteignent totalement à Amsterdam en dépit de l’ouverture du score de Couécou. Un doublé de Cruyff et des réalisations de Swart et Haan font la différence pour les Lanciers. En quart de finale, Arsenal se profile et même si Kennedy marque un but à l’extérieur contre un doublé pour Gerrie Mühren, les Gunners s’inclinent à Highbury sur un but contre son camp de George Graham.
Dans le dernier carré, Amsterdam tombe sur un client avec Benfica. Le club portugais de la star Eusébio a remporté le trophée à deux reprises au début des années 60 et s’appuie sur plusieurs internationaux portugais comme Humberto Coelho, Jaime Graça ou Toni. Victorieux sur la plus petite des marges, les Néerlandais conservent leur avantage à La Luz pour rejoindre à nouveau la finale. La troisième en quatre ans. Face à eux, ils trouvent les redoutables Italiens de l’Inter Milan. Le style de jeu des deux équipes est complètement en opposition. D’un côté le catenaccio hérité de Helenio Herrera et des sacres de 1964 et 1965, de l’autre le football offensif et spectaculaire des Bataves. À Rotterdam, les deux formations se respectent et la rencontre est d’abord assez tactique. Si l’Ajax a la possession, il faut attendre une mésentente entre Oriali et Bordon pour voir Cruyff débloquer le score. Le « Hollandais volant » porte bien son surnom et double la mise sur corner dans le dernier quart d’heure en prenant le dessus sur son défenseur dans les airs et marquant de la tête le but de la victoire.
La génération dorée de l’Ajax poursuit sa moisson la saison suivante. Grand favori à sa propre succession, le club néerlandais ne faillit pas dans la conquête d’un troisième titre consécutif. Exempt du premier tour, ils commencent la compétition en huitièmes de finale. Les Bulgares du CSKA Sofia sombrent alors à domicile et à l’extérieur. Le sort offre le Bayern Munich de Maier, Schwarzenbeck, Breitner, Beckenbauer, Hoeness et Müller et propose un choc avant l’heure entre les deux formations. Pourtant, les joueurs de RFA sont littéralement balayés tel un fétu de paille par la tornade ajacide. La défaite est très sévère malgré la bonne entame de match des Bavarois. La différence se fait en seconde mi-temps quand les individualités se fondent dans le collectif pour mieux étouffer l’adversaire grâce à un pressing intensif. A l’Olympiastadion, la mission est impossible pour le Bayern. Mais la grande rivalité entre les deux nations additionnée au sursaut d’orgueil des Ouest-Allemands débouchent sur un succès de prestige, insuffisant pour combler le retard pris à Amsterdam.
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En demi-finale, un nouvel opposant de taille se dresse face à l’Ajax. Le Real Madrid, sextuple lauréat de la compétition, cherche à reconquérir le trophée dans son épreuve préférée. Les Godenzonen assurent l’essentiel dans la première manche du duel en s’imposant 2-1 mais le but de Pirri laisse la porte ouverte pour une remontée des Merengues au Bernabéu. Mais cette équipe de l’Ajax ne fait pas de sentiment et gagne dans l’enceinte madrilène son ticket pour Belgrade grâce à Gerrie Mühren. Comme l’année précédente, un club italien fait face au double tenant du titre. Mais cette fois, il s’agit de la Juventus qui fait figure d’outsider et s’apprête à disputer sa première finale.
Le début de match n’incite pas à l’optimisme pour les Turinois. Un ballon anodin, mis dans la surface par le défenseur axial Blakenburg, se transforme en passe décisive pour Johnny Rep. L’attaquant devance Longobucco et envoie une tête lobée dans le petit filet opposée qui trompe Dino Zoff. La Juve tente d’égaliser en contre-attaque et parvient à créer le danger dans la défense néerlandaise. Sans succès. L’Ajax gère son avance et utilise le piège du hors jeu pour annihiler les attaques bianconeri. Anastasi fait passer un dernier frisson dans le dos de Ștefan Kovács mais Blackenburg sauve in extremis. Au coup de sifflet final, Amsterdam devient la première équipe depuis le Real à remporter le titre trois années de suite. La passe de quatre pour le football néerlandais si on ajoute la victoire du Feyenoord en 1970.
Après ce troisième succès, le cycle victorieux de l’Ajax prend fin. Les stars Cruyff et Neeskens rejoignent respectivement Barcelone en 1973 et 1974. Si Amsterdam poursuit sa collection de titres nationaux en formant de nouvelles générations de joueurs (Arnesen, Lerby, Kieft, Silooy, Vanenburg, Rijkaard, van’t Ship, Menzo, Robert Witschge, Blind, Verlaat, Richard Witschge, Winter, Bergkamp, R. et F. de Boer…) lors des décennies suivantes, l’équipe rentre ensuite dans le rang au niveau européen. Pendant plus de vingt ans, le triple champion d’Europe ne performe pas en Coupe des Champions avant de voir émerger une nouvelle génération dorée menée par un jeune coach ambitieux, Louis van Gaal. Vous en saurez plus quand vous lirez l’épisode sur les années 90.
Leeds United (1975)
Si nous nous en tenons uniquement au palmarès à la date de cette finale, Leeds United n’est pas considéré comme un cador anglais. Avec seulement une League Cup en 1968, deux titres de champion en 1969 et 1974, un Charity Shield en 1970 et une FA Cup en 1972 en cinquante-cinq ans d’existence, l’armoire à trophée des Peacocks ne déborde pas de breloques. Néanmoins, un homme a beaucoup apporté à cette équipe. Pendant plus d’une décennie de 1961 à 1974, Don Revie a permis de placer Leeds sur la carte du Royaume et a laissé une trace indélébile. Une étude du magazine Total Sport classe son Leeds parmi les cinquante meilleures équipes de tous les temps. À l’aube de la saison 1974/1975, Don Revie rejoint la sélection anglaise. Son successeur, le bientôt mythique Brian Clough, ne reste que quarante-quatre jours à son poste, suffisamment pour passer le premier obstacle contre le FC Zurich, avant d’être à son tour remplacé par Jimmy Armfield.
Le nouveau manager prend en charge l’équipe début octobre 1974 et s’appuie sur l’héritage de Revie pour mener cette équipe vieillissante mais encore séduisante en Europe. Son premier test intervient face à Újpesti Dózsa. En Hongrie, les Anglais prennent une belle option grâce à Lorimer et McQueen. Le succès est validé à Elland Road par une large victoire. En quart de finale, les Belges de Anderlecht subissent le même résultat en Angleterre. Un déficit trop large à récupérer au match retour où, de surcroît, Leeds s’impose (0-1). Encore une fois, en demi-finale, les Peacocks commencent par disputer leur premier match à domicile et héritent d’un sacré client avec le FC Barcelone. Dirigés par Rinus Michels, composés notamment de Cruyff et Neeskens, les Catalans subissent pourtant une courte défaite (2-1) dans le Yorkshire. Au Camp Nou, Lorimer permet à ses coéquipiers de se prémunir d’un retour des Barcelonais. L’égalisation de Clares est insuffisante pour le Barça. Leeds conquiert son billet pour la finale disputée au Parc des Princes.
Face à eux, l’ogre munichois composé de champions du monde 1974 comme Franz Beckenbauer, Gerd Müller et Uli Hoeneß est l’adversaire des Anglais. Pourtant, en dépit du statut de favoris des joueurs allemands, Leeds domine la plus grande partie du match. Mais plusieurs décisions litigieuses de la part de l’arbitre français Michel Kitabdjian vont émailler le sort de cette partie. Après un penalty refusé pour une faute du Kaiser sur Allan Clarke, l’arbitre accorde un but à Peter Lorimer avant de le refuser sur l’insistance de Beckenbauer pour un hors-jeu passif de Billy Bremner. Cette volte-face engendre des émeutes dans les tribunes et une interruption de match. Dès la reprise du jeu, le Bayern ouvre la marque par Roth et Leeds perd son sang-froid. Dix minutes plus tard, les Allemands doublent la mise grâce à l’inévitable Gerd Müller et s’offrent une deuxième coupe consécutive.
Jimmy Armfield ne décolère pas : « Nous étions une meilleure équipe que le Bayern Munich. Nous n’avons pas été battus par une meilleure équipe. Nous avons été battus par un mauvais arbitre. Je n’ai jamais changé d’avis. » Il ajoute : « Nous avons eu deux penalties refusés. On a marqué un très bon but qui a été refusé. Et tout ce qu’il donnait semblait être contre nous tout le temps. J’ai toujours été considéré comme un homme raisonnablement juste, mais je ne voyais rien de très bien chez cet homme. »
Exclus pendant trois ans suite aux débordements en tribune, les Anglais ne disputent plus une seule finale avant… 1996 et une finale de League Cup. Ils remportent à nouveau le championnat en 1992 avec un certain Éric Cantona. Puis après une belle période sportive (Ferdinand, R. Keane, Kewell, Martyn, Radebe, A. Smith, Viduka, Woodgate) sous la direction de David O’Leary, le président Peter Ridsdale provoque une crise financière sans précédent à cause de transferts onéreux et Leeds s’enfonce jusqu’en League One (troisième division). Après seize ans d’absence, l’équipe dirigée par Marcelo Bielsa retrouve enfin la Premier League en 2020 et conserve sa place en obtenant une très belle neuvième position.
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Saint-Étienne (1976)
Vingt ans après le Stade de Reims, un autre représentant tricolore s’illustre à nouveau dans la plus prestigieuse des compétitions européennes. Cette fois, ce sont les Verts de Saint-Étienne. Place forte du football français dans les années 60, le club du Forez connaît quelques turbulences en interne au début des années soixante-dix quand plusieurs joueurs quittent Saint-Étienne pour signer à Marseille. Lassé des interférences de son président Roger Rocher, Albert Batteux quitte son poste. Rocher nomme l’ancien capitaine et jeune retraité Robert Herbin sur le banc. Le « Sphinx » s’appuie alors sur le centre de formation récemment couronné en Coupe Gambardella pour reconstruire son effectif. Bathenay, Janvion, Lopez ou Sarramagna intègrent donc l’équipe première. Ils reconquièrent le titre de champion de France 1974 devant le FC Nantes. Déjà en 1975, les Verts réalisent un très bon parcours en Coupe des Champions, échouant en demi-finale contre le Bayern Munich, futur lauréat de la compétition.
L’année suivante, une nouvelle épopée européenne prend forme après un premier succès face au KB Copenhague avec des buts de Larqué à l’aller et au retour. Au tour suivant, le succès des Vers acquis à l’aller à Geoffroy Guichard limite les chances des Rangers. D’ailleurs, Saint-Étienne l’emporte également à Hampden Park. Le tirage au sort leur offre le Dynamo Kiev après la trêve hivernale. À Simferopol, c’est la Bérézina. L’équipe, dirigée par l’imperturbable Valeri Lobanovski et avec le Ballon d’Or 1975 Oleg Blokhine, inflige une défaite nette et sans bavure. Pour se qualifier en demi-finale, il faut un exploit.
Dans un Chaudron chauffé à blanc, le match retour devient mythique. Les Soviétiques gèrent leur avance acquise à l’aller. Mais le tournant du match intervient un peu après l’heure de jeu quand Blokhine file vers le but de Ćurković. L’attaquant résiste à Janvion et élimine Lopez d’un sublime double contact. Il entre dans la surface, il va marquer. Pourtant, Lopez revient à toute vitesse et ne se laisse pas embarquer par le crochet de l’attaquant ukrainien qui voulait se remettre sur son pied droit. Il dégage et trouve un coéquipier qui lance un contre fulgurant conclu par Hervé Revelli. Quelques instants plus tard, le capitaine Jean-Michel Larqué se charge d’égaliser sur l’ensemble des deux rencontres grâce à un superbe coup-franc à l’entrée de la surface. La prolongation tourne en faveur des Français quand Jacques Santini initie un mouvement sur le côté droit de l’attaque et décale Revelli. Le premier buteur part dans une série de crochets, sert parfaitement en retrait Rocheteau qui, malgré les crampes, reprend le ballon et le propulse sous la barre. L’Ange vert offre le billet pour la demi-finale au Chaudron.
Contre le PSV Eindhoven, le scénario des deux matchs est moins spectaculaire. Larqué permet à son équipe de prendre un avantage à l’aller et Saint-Étienne atteint l’ultime manche de la compétition en obtenant un précieux nul aux Pays-Bas. Si les joueurs de Robert Herbin sont en confiance grâce à l’élan populaire créé autour de leur parcours continental, le favori de la rencontre n’est autre que le double tenant du titre : le Bayern Munich.
Un premier coup dur frappe les Français qui doivent composer avec la blessure de l’Ange Vert Dominique Rocheteau en demi-finale. Malgré leur statut d’outsider, Saint-Étienne domine l’équipe allemande surtout en première période. À deux reprises, les montants du gardien allemand Sepp Maier repoussent les tentatives de Bathenay et Santini. Dans l’enceinte de Hampden Park, les poteaux sont encore carrés. Une rareté pour l’époque où les poteaux ronds sont désormais majoritaires. Ils rentrent dans la légende. Après avoir laissé passer l’orage, les Munichois débloquent la situation sur un coup-franc indirect joué par Beckenbauer et transformé par Roth. L’entrée d’un Rocheteau diminué à la 83ème minute ne change rien et le Bayern égale la performance réussie trois ans plus tôt par l’Ajax avec trois succès consécutifs.
La domination des Verts sur le foot français prend fin en 1981 avec le dernier titre en date du club. L’équipe du Forez alterne alors des passages en Première Division et à l’échelon inférieur (1984, 1996 et 2001). À la recherche de sa gloire passée, Saint-Étienne n’a plus participé à la C1 depuis 1982 et galère souvent quand les Verts ont la chance de jouer sur la scène européenne comme en témoigne leur dernière campagne d’Europa League lors de la saison 2019/20 (troisième du groupe I avec seulement quatre points au compteur).
Club Bruges (1978)
Fondé en 1891, et lauréat de son premier titre de champion de Belgique en 1920, Bruges doit patienter jusqu’à la fin des années soixante et le début des années soixante-dix pour enrichir son palmarès. Vainqueurs en 1973, 1976 et 1977, les Flamands dominent leur championnat quand ils débutent la campagne européenne de 1977/78. Après un tour de chauffe facilement géré contre les Finlandais de KuPS Kuopio 9-2 sur l’ensemble des deux rencontres, Bruges a un adversaire plus coriace en huitièmes de finale. Face au Panathinaïkos, les Belges assurent à l’aller mais jouent avec le feu au retour avec cette courte défaite en Grèce. Encore impérial à domicile, Bruges connaît des turbulences au Vincente Calderón de l’Atlético de Madrid. Les Espagnols refont leur retard en première mi-temps par Benegas et Pina. Le match s’anime à l’heure de jeu quand Cools redonne virtuellement l’avantage aux hommes de Ernst Happel. Deux minutes plus tard, Pina – encore lui – pense offrir la qualification à son camp mais Raoul Lambert réduit l’écart à la 69ème minute. Un but très important puisqu’il qualifie les Belges en demi-finale.
L’opposition entre la Juventus de Trapattoni et l’équipe du technicien autrichien est incertaine et serrée. Au Stadio Comunale, chaque équipe domine une période. La première pour les Belges en dépit de l’absence du buteur Raoul Lambert. La seconde pour les Italiens qui trouvent la faille en fin de match sur une belle action débutée sur le côté gauche et conclue de près par Bettega suite à une astucieuse remise en une touche de Causio. Au retour, Bruges égalise par l’intermédiaire du latéral Bastijns, trouvé sur le côté droit suite à une longue transversale venue de l’opposé, qui trompe Zoff dès la 3ème minute. Au cours de la partie, la Juve a plusieurs occasions de recoller au score mais se montre maladroite. En prolongation, Bruges plante un contre fatal pour les coéquipiers de Cabrini, Gentile et Tardelli. Vandeyrecken reprend facilement au second poteau un superbe centre pour tromper la vigilance de Dino Zoff.
De retour en finale après le succès acquis en 1970 avec le Feyenoord, Ernst Happel doit faire face au champion en titre : Liverpool. Si Bruges n’a jamais atteint ce niveau auparavant, les coéquipiers de Kenny Dalglish ont donc déjà l’expérience de l’évènement. Pour contrecarrer les Anglais, le coach autrichien met en place une tactique prudente accouplée à un marquage serré et au piège du hors-jeu. Après des débuts ennuyeux, Liverpool parvient à desserrer l’étau belge. Kennedy et Fairclough se procurent de belles actions mais butent sur Jensen, le gardien danois de Bruges. De retour des vestiaires, McDermott met encore à contribution le portier adverse mais les coéquipiers de Georges Leekens décident enfin de sortir un peu pour, eux aussi, tenter leur chance. Cependant, la rencontre bascule en faveur des Scousers un peu après l’heure de jeu. Bien servi dans la surface par Souness, Dalglish trompe enfin Jensen pour l’ouverture du score et fait exploser Wembley.
En fin de match, Ray Clemence préserve l’avantage sur la dernière action adverse et les hommes de Bob Paisley deviennent ainsi la première équipe britannique à conserver le trophée. Depuis ce jour, Bruges a connu des fortunes diverses. L’équipe flamande joue régulièrement en Europe mais, hormis deux demi-finales en Coupe de l’UEFA en 1988 et en Coupe des coupes en 1992, les Blauw en Zwart n’ont quasiment plus jamais retrouvé les sommets continentaux. Et si Anderlecht demeure le club le plus titré de Belgique avec trente-quatre unités, Bruges est la deuxième puissance du pays avec dix-sept couronnes nationales. Depuis deux saisons, le club profite de l’instabilité des Mauves pour combler un peu l’écart avec le club bruxellois et prendre la place de leader du football belge. Sans néanmoins faire des étincelles en Europe comme le prouve la troisième place du groupe F (Dortmund, Lazio et Zenit) en Champion’s League lors de la saison 2020/21.
Malmö FF (1979)
Lors de cette campagne 1978/79, les surprises se succèdent et les ténors sont vite hors course. Malmö va alors en profiter pour écrire l’une des plus belles pages de son histoire. Tout d’abord, les Suédois se détachent de Monaco en s’imposant au match retour à Louis II après un nul sans but en Scandinavie. Ensuite, ils résistent au Dynamo Kiev de Blokhine pour s’imposer à domicile grâce à Cervin et Kinnvall. À ce niveau de la compétition, Liverpool, le Real Madrid, la Juventus sont déjà hors jeu. Le tirage au sort propose une affiche inattendue contre le Wisła Cracovie. Malgré une défaite en Pologne, Malmö balaie les Polonais à la maison avec un triplé de Anders Ljungberg (rien à voir avec Freddie, l’ancien Gunner). La double confrontation face à l’Austria Vienne démontre une nouvelle fois la solidité de l’équipe dirigée par Bobby Houghton avec une seule défaite à la clé en huit oppositions.
Les Suédois deviennent la première équipe scandinave à atteindre la dernière manche de la Coupe d’Europe des clubs champions. Et cette vingt-quatrième édition offre une finale inédite entre deux clubs peu connus sur la scène européenne puisque l’adversaire (Nottingham Forest) est également novice en la matière. Malheureusement pour les Nordiques, le sort semble s’acharner sur eux. En plus de l’absence du milieu de terrain Bo Larsson et du défenseur Roy Andersson (deux de leurs meilleurs joueurs), ils doivent également composer avec la blessure (fracture de l’orteil) de leur capitaine Staffan Tapper survenue la veille de la finale lors du dernier entraînement. C’est donc une équipe très diminuée qui s’apprête à affronter Forest à Munich.
Comme Bruges l’année précédente, Malmö opte pour une tactique défensive. Regroupés dans son camp, Di blåe (les Bleus) subissent la loi des Britanniques. Möller s’interpose devant les attaquants de Brian Clough. Mais Trevor Francis, arrivé quelques mois plus tôt en provenance de Birmingham City, délivre ses coéquipiers juste avant la pause sur une offrande de John Robertson. Avec ce déficit au tableau d’affichage, les Scandinaves courent après le score sans parvenir à inverser la tendance. Birtles et Robertson manquent d’aggraver la marque pour Nottingham mais cela ne change rien pour les Anglais qui décrochent une victoire aussi surprenante qu’inédite. Malmö ne réédite pas cet exploit malgré un solide palmarès et un statut de poids lourd du football suédois. L’une des principales attractions du club reste l’éclosion d’un jeune joueur à l’insolence proportionnelle à son talent, un certain Zlatan Ibrahimović.
Nottingham Forest (1979)
Les années soixante-dix sont une décennie où la Coupe des Clubs Champions est marquée par plusieurs dominations successives. Dans un premier temps, il y a celle des Néerlandais (Feyenoord et Ajax) puis les Allemands avec le Bayern et enfin les clubs anglais (Liverpool principalement). Nottingham Forest s’inscrit dans cette hégémonie britannique. Vainqueur de leur premier titre de champion d’Angleterre en 1978, les Tricky Trees gagnent leur ticket pour l’Europe. Dirigé par le mythique Brian Clough, Forest élimine le double tenant du titre liverpuldien dès les seizièmes de finale. Le succès acquis à l’aller grâce à Birtles et Barrett est suffisant pour résister à la terrible ambiance du Spion Kop à Anfield et aux attaques des Reds. Comme vous l’avez lu ci-dessus avec le parcours de Malmö, cette édition offre de multiples surprises. Et les futurs adversaires des Anglais ne sont pas forcément des ténors européens. L’AEK Athènes ne fait pas le poids. Nottingham s’impose dans la capitale hellène et finit le job au City Ground avec une sévère correction. Tombeurs du Real Madrid au tour précédent, les Grasshoppers Zurich subissent aussi une fessée dans les Midlands. L’avance n’est pas rattrapée au retour.
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Dernier opposant avant la finale, les Allemands de Cologne offrent une résistance plus consistante aux coéquipiers de Peter Schilton. Dans une rencontre prolifique et pleine de suspens, Die Geiβböcke (les Boucs) frappent en premier et climatisent l’atmosphère du City Ground à deux reprises par Van Gool et Dieter Müller. Nottingham ne tarde pas à réagir. D’abord, Birtles réduit l’écart en première période. Puis, Bowyer (rien voir avec Lee, l’ancien Peacock) et Robertson redonnent l’avantage aux locaux. Pourtant, Cologne égalise dans les derniers instants du temps réglementaire et signe une très bonne opération. L’abnégation des joueurs de Brian Clough renverse des montagnes. Ils s’imposent en Allemagne et gagnent le droit de défier Malmö en finale. Une finale inédite.
Si les clubs anglais dominent l’Europe depuis déjà deux saisons, Nottingham n’est pas fait du même bois que Liverpool. Avant de remporter le titre de champion d’Angleterre la saison précédente, le palmarès de Forest se résume à une seconde place lors du championnat 1966/67, deux titres de Second Division (1907 et 1922), deux FA Cup (1898 et 1959), une League Cup (1978) et un Charity Shield (1978). Bien loin des Reds. Dans un finale à sens unique en faveur des Anglais, Nottingham met pourtant du temps avant de faire sauter le verrou suédois. Et c’est la nouvelle et récente recrue Trevor Francis, acheté pour un million de livres sterling (rien à voir avec Raheem, l’actuel Citizen), qui débloque le score en faveur de Forest. Si Birtles et Robertson ont l’opportunité de donner plus de relief au succès britannique, le tableau d’affichage demeure inchangé jusqu’à la fin du match. Brian Clough et son équipe réalisent un authentique exploit. Le petit club provincial entre dans la cour des Grands. Dans le prochain épisode, vous verrez la suite des aventures européennes de Forest.
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Crédits photo : Icon Sport