À l’instar de Bobby Moore, Trevor Brooking ou de nos jours de Mark Noble, William «Billy» Bonds est une véritable légende des Hammers. Peut-être même le joueur préféré des fans de l’East London. Retour sur la carrière de « Bonzo ».
Avant d’être recruté contre 47 500£ par West Ham United en 1967, William Bonds a d’abord travaillé pendant quelques mois dans une usine fabriquant des hélices d’avion puis a commencé son parcours footballistique dans les rangs de Charlton en février 1965. Après quatre-vingt-quinze apparitions sous les couleurs des Addicks, il est repéré dans le sud de la capitale anglaise par l’entraîneur des Hammers (et futur sélectionneur des Three Lions) Ron Greenwood. Né en 1946, le jeune homme n’a alors que 21 ans quand il débarque à Upton Park. Sous son nouveau maillot, il débute au poste de latéral droit et occupe ce rôle pendant trois saisons où il marque les esprits par sa régularité, sa compétitivité, sa combativité et son énergie déployée sur le terrain.
Quand ses adversaires le rencontrent, ils savent qu’ils vont passer un après-midi compliqué. Avoir six foot two (1m80) avec ses deux yeux bleus à son marquage n’est pas une sinécure. Au cours des saisons 1968/69, 1969/70 et 1970/71, il ne dispute pas moins de cent-vingt-quatre matchs de championnat consécutivement avant qu’une blessure contractée en octobre 1970 vienne le stopper dans cette incroyable série. Au début de la saison 1970/71, le coach Greenwood le replace dans l’entrejeu. Ce repositionnement est tout sauf une lubie. C’est un choix stratégique. Pour le manager londonien, l’idée est d’équilibrer ce secteur de jeu avec un élément défensif comme Bonds afin de laisser plus de liberté offensive à Trevor Brooking, joueur élégant et créatif, en le délestant de certaines tâches défensives ingrates. Footballeur talentueux et intelligent, Billy ne tarde pas à trouver ses marques à ce nouveau poste de milieu défensif grâce à une grosse activité sur le terrain et il se montre même dangereux sur le plan offensif comme en atteste ses treize buts lors de la saison 1973/74 dont un hat-trick contre Chelsea lui assurant (temporairement) la première place au classement des buteurs. Hammer of the year (titre honorifique, meilleur du club) en 1971, il récidive en 1974 et 1975.
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Les succès
Et pour cause, les seventies sont sûrement l’apogée de sa carrière. Quand l’emblématique défenseur central anglais Bobby Moore quitte son club formateur pour Fulham après seize années de bons et loyaux services, les Irons sont à la recherche d’un nouveau capitaine pour la première fois depuis douze ans. La responsabilité est énorme. Succéder au capitaine des Three Lions à la Coupe du Monde 1966 n’est pas une mince affaire. Pourtant, « Bonzo » accepte le challenge sans la moindre hésitation. Avec ce bout de tissu au bras gauche, le vaillant et combatif capitaine guide son équipe vers le succès avec deux victoires en FA Cup. La première en 1975 contre le Fulham de… Bobby Moore, la seconde en 1980 face à Arsenal. D’ailleurs, West Ham réussit l’exploit de remporter ce deuxième trophée alors que l’équipe évolue alors en Deuxième Division.
À ce jour, aucun autre club venant d’une division inférieure à la Premier League n’a gagné cette compétition. À cette occasion, Bonds devient le seul capitaine des Hammers à soulever deux fois la Cup. Le palmarès de West Ham aurait pu être encore plus significatif si les coéquipiers de Bonds n’avaient pas perdu la finale de Coupe des Coupes 1976 contre Anderlecht et de la League Cup 1981 face à Liverpool. Trevor Brooking, son coéquipier pendant dix-sept saisons, raconte : « C’était un leader. Il montrait l’exemple, il avait le cœur sur la main. » Après l’avoir converti de latéral en milieu de terrain, Greenwood réédite l’opération à la fin de la saison 1976/77 quand il décide de le faire redescendre d’un cran et de l’installer dans l’axe de sa défense. L’entraîneur anglais estime qu’il est capable de ressortir proprement les ballons. Et comme auparavant, Billy s’adapte parfaitement à son nouveau rôle associant solidité dans les duels et relance propre grâce à sa superbe technique individuelle. Parfois, il s’autorise même quelques chevauchées vers l’avant depuis son propre camp pour semer le désordre dans la défense adverse.
Une loyauté à toute épreuve
Relégué à l’issue de la saison 1977/78, West Ham conserve la très grande majorité de son effectif en dépit de la descente en deuxième division. Billy Bonds est au centre d’un noyau dur de joueurs comme Trevor Brooking, Pat Holland ou encore Frank Lampard Senior qui décident de rester à Upton Park pour aider leur club à retrouver l’élite au plus vite. Ce choix démontre tout leur attachement envers leurs couleurs. Ces vieux briscards encadrent quelques jeunes joueurs formés au club tels que Paul Allen, Alvin Martin, Geoff Pike et d’autres comme Alan Devonshire. Leurs efforts sont récompensés en 1981 avec l’accession à l’étage supérieur à l’issue d’une saison maitrisée et récompensée du titre de champion de D2. Joueur de devoir à l’exemplarité exceptionnelle, il dépasse en 1982 le record de matchs disputés avec West Ham appartenant à son ancien capitaine Bobby Moore. Trevor Brooking assure à l’occasion : « J’ai toujours considéré Bill comme la meilleure recrue de l’histoire du club. »
Deux ans plus tard, « Bonzo » décide de mettre un terme à sa carrière et prend sa retraite. Enfin, pas pour longtemps. Trois mois plus tard, en août 1984, il reprend du service pour pallier à une hécatombe de blessés. Lui-même handicapé par plusieurs blessures, il poursuit néanmoins l’aventure pendant encore quatre ans et en profite pour glaner un nouveau titre de Hammer of the year en 1987. À l’âge de 41 ans et 226 jours, il prend définitivement sa retraite de joueur. En 2018, il entre définitivement dans le Hall of Fame quand il est élu meilleur joueur du club. D’ailleurs, le club lui rend un hommage appuyé en 2019 quand les dirigeants décident de nommer l’une des tribunes du London Stadium, où West Ham a pris ses quartiers en 2016, du nom de leur emblématique joueur tout comme ses anciens coéquipiers Bobby Moore (décédé en 1993) et Trevor Brooking qui ont également chacun leur tribune. L’officialisation intervient lors de la réception de Newcastle.
Billy Bonds coupe le ruban, reçoit une standing ovation de la part de tout le stade et est submergé par l’émotion. L’équipe lui offre une victoire contre les Magpies. Encore aujourd’hui, le capitaine de l’équipe Mark Noble prend en exemple Billy Bonds comme le confirme son témoignage : « Ce que Billy représente dans ce club, non seulement pour les joueurs qui signent pour nous, mais pour les fans, ce sont les performances, le travail acharné, le courage et la détermination avec lesquels il a joué. Il incarne ce club. » Une belle déclaration de la part de Mister West Ham, formé au club et qui a passé toute sa carrière dans l’East London, qui s’appuie sur l’héritage de son aîné pour léguer aux autres joueurs de l’effectif les valeurs de West Ham.
Avec 799 matchs sous le maillot Claret and Blue, « Bonzo » détient le record d’apparition pour le club de l’East London. Peut-être moins majestueux que Bobby Moore et sûrement moins talentueux que Trevor Brooking, Billy Bonds n’en demeure pas moins l’un des meilleurs joueurs de West Ham United.
Sources :
- Six foot two, eyes of blue, Billy Bonds is after you de Ken Dyer, whufc.com
- Billy Bonds : A life in Claret and Blue, whufc.com
- Billy Bonds de Paul McCarthy, nationalfootballmuseum.com