Ces vingt dernières années, de nombreux clubs ont accédé au football français professionnel à la suite d’une ascension fulgurante. On peut citer en exemples Evian Thonon Gaillard, le Gazélec Ajaccio, l’US Boulogne ou encore le FC Istres. Ils sont aujourd’hui retombés dans l’oubli, au sein de divisions inférieures amateures. C’est notamment le cas de l’AC Arles-Avignon, qui de 2006 à 2015 a vécu une belle histoire de football, avec pour point d’orgue la saison 2010-2011 de Ligue 1.
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De la CFA2 à la professionnalisation (2006-2009)
Avant de devenir l’AC Arles-Avignon, ce club situé à Arles se nommait seulement l’AC Arlésien. Le club de football de la cité romaine est né en 1912 de la fusion de trois associations : La Pédale Joyeuse, Arles Auto-Vélo et Arles Sports. C’est pendant les années 1970 que les Lions ont connu leur meilleure période. Après plusieurs saisons passées au troisième échelon du football français, l’AC Arlésien monte en Deuxième Division et passe, en cumulé, sept saisons dans l’antichambre de l’élite durant cette période.
Suite à ces années fastes, l’ACA retombe dans ses travers et les divisions inférieures navigant de la cinquième à la troisième division C’est après cinq saisons passées dans l’ancienne CFA2 que les Lions entament leur marche vers ce qui reste aujourd’hui une des plus belles histoires du football amateur français. Sous l’égide de Michel Estevan, ils montent en CFA, avec une belle deuxième place lors de la saison 2005-2006 de CFA2.
L’année suivante, ils atomisent la concurrence en finissant premier du championnat de CFA avec 96 points. Les Lions rejoignent logiquement le championnat de National : dernière marche avant de retrouver le niveau des années 1970. Lors de la saison 2007-2008, l’AC Arlésien fait mieux que jouer le maintien puisqu’il accroche une belle huitième place. La saison suivante, le club des Bouches du Rhône arrache la troisième place et monte alors en Ligue 2. 30 ans après, l’ACA retrouve l’antichambre du football français et par la même occasion gagne le statut de professionnel. Les Lions peuvent rugir de nouveau.
Une saison de haute volée (2009-2010)
En juin 2009, le club est rebaptisé Athletic Club Arles-Avignon. En effet, l’ACA doit évoluer au Parc des Sports de la cité des Papes afin de pouvoir jouer en Ligue 2. Après quelques différends avec la Direction Nationale du Contrôle de Gestion (DNCG) et la Ligue de Football Professionnel (LFP), l’AC Arles-Avignon devient officiellement un club professionnel en juillet 2009. La saison de Ligue 2 peut se lancer.
Toujours emmené par Michel Estevan, la direction privilégie un recrutement pléthorique mais intéressant. Ainsi, Sébastien Piocelle, Maurice-Junior Dalé, Kaba Diawara ou encore André Ayew sont recrutés et débarquent dans le Sud de la France. La saison commence par une victoire contre le Clermont Foot 2-1 avec des buts d’Abdelmalek Cherrad et Kaba Diawara. Victoire qui en appellera d’autres puisque à la mi-championnat, les résultats de l’ACA dépassent largement les attentes. Attendus pour jouer le maintien, les Lions possèdent 33 points et se positionnent à la troisième place du championnat de Ligue 2.
L’ensemble de cette saison de Ligue 2 est marquée par une très grosse concurrence pour la montée. En une défaite, une équipe peut perdre plusieurs places et inversement. Aucun doute sur le champion et son dauphin tant le Stade Malherbe de Caen et le Stade Brestois ont dominé cette Ligue 2. En revanche, tout reste possible à l’aube de la dernière journée. Le SCO d’Angers (6ème), Clermont Foot (5ème), le FC Metz (4ème) et l’AC Arles-Avignon (3ème) se tiennent en trois points.
L’accession à la Ligue 1
L’AC Arles-Avignon possède son destin entre ses mains. Pour être sûr de monter, il faut gagner ce dernier match face au Clermont Foot, candidat aussi à la montée. Dès la 14ème minute, Benjamin Psaume, auteur d’une très bonne saison (4 buts et 10 passes décisives), ouvre le score. Les Lions résistent jusqu’à la fin du match et s’imposent 1-0 face aux Auvergnats. Devant plus de 7800 spectateurs, ils valident leur troisième place synonyme de montée en Ligue 1. La Parc des Sports d’Avignon chavire.
Avec quatre montées en cinq ans, en passant de la CFA2 à la Ligue 1, les Arlésiens se sont donnés les moyens pour accéder à l’élite du football français. L’intersaison est tout d’abord marquée par un changement de président. En effet, Jean-Marc Conrad propose à Michel Estevan un contrat juteux, pas trop au goût des actionnaires. D’un point de vue financier, le budget serait trop déséquilibré avec un contrat pareil. Les deux actionnaires majoritaires, François Perrot et Marcel Salerno, prennent le flambeau. Salerno est nommé président et profite de l’aide de Rolland Courbis. Estevan, lui, est un temps écarté, puis reconduit à son poste.
L’ACA perd deux joueurs majeurs de la montée : André Ayew et Maurice-Junior Dalé. Le premier repart à Marseille, le second est vendu dans un club roumain, l’Unirea Urziceni. Comme lors de la saison passée en Ligue 2, le club possède le plus petit budget du championnat. Le mercato est donc très difficile et surchargé. On retrouve notamment du côté des arrivées : l’attaquant algérien Hameur Bouazza, le jeune Montpelliérain Rémy Cabella, les deux Grecs champions d’Europe 2004 Basinas et Charisteas ou encore le défenseur formé au Real Madrid Alvaro Mejia.
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La Ligue 1 : une marche trop haute (2010-2011)
L’AC Arles-Avignon entame cette saison 2010-2011 par une défaite 2-1 sur le terrain du FC Sochaux. Lors de la cinquième journée de championnat, l’ACA se déplace au Parc des Princes. Les Lions s’inclinent 4-0 face au PSG. C’est la défaite de trop, la cinquième en autant de matchs. Michel Estevan est licencié le soir même. Le Bosniaque Faruk Hadzibegic le remplace à la tête du club des Bouches du Rhône.
Il faudra attendre la mi-octobre et la neuvième journée pour voir les Arlésiens décrocher leur premier point. Face à un autre promu, le Stade Brestois, l’ACA arrache le 0-0 et marque son premier point en Ligue 1. Tout ne semble pas perdu et ce match nul semble être un élément déclencheur et avoir lancé la saison des Lions. En effet, lors de la journée suivante, ils accrochent l’OL 1-1 au Parc des Sports d’Avignon.
C’est face à l’autre promu, Caen, que l’AC Arles-Avignon gagne son premier match en Ligue 1 lors de la 12ème journée. Le bilan reste tout de même très faible, trop faible pour pouvoir espérer se maintenir. Dès la 31ème journée, les Lions sont relégués en deuxième division. C’est la descente la plus rapide de l’histoire de la Ligue 1 à 20 clubs. Trois victoires seulement dont deux acquises lors des 36 et 37èmes journées, 11 nuls et 24 défaites. C’est un des plus mauvais bilans de l’histoire de la Ligue 1.
Structurellement, le club n’était sans doute pas prêt à une telle ascension. Les infrastructures n’étaient pas à la hauteur du niveau auquel l’ACA jouait. Les cadres de la montée n’ont pas tous été conservés et le recrutement a été hasardeux. Malgré toutes ces difficultés, les joueurs ont gardé un état d’esprit irréprochable, tout comme les supporters. Cela n’a pas suffi : le rêve arlésien prend fin brutalement.
Maintien dans l’antichambre du foot français (2011-2014)
Après un épisode éphémère en Ligue 1, l’AC Arles-Avignon a pour principal objectif de se maintenir en Ligue 2 et essayer de construire un projet à moyen long terme. Le gardien de but Ludovic Butelle est recruté, tout comme Luigi Pieroni ou encore Téji Savanier.
La saison 2011-2012 est en dent de scies. Après des débuts intéressants et une victoire 3-0 contre le RC Lens, les Lions vont déchantés. Ils vont se retrouver dans la zone de relégation. Suite à la défaite en Coupe de France contre l’AS Valence, club de CFA, Faruk Hadzibegic est licencié, remplacé quelques jours plus tard par Thierry Laurey. Sous l’égide de celui-ci, le club entame une remontée, avec 17 matchs sans défaite pour finalement terminer à la 13ème place.
Les saisons 2012-2013 et 2013-2014 sont assez similaires. L’irrégularité des résultats ont raison de Thierry Laurey qui est licencié début novembre 2012. C’est Pierre Mosca qui assure l’intérim avant l’arrivée de Franck Dumas. Faisant avec les moyens du bord, l’ACA parvient à se maintenir en Ligue 2, finissant aux 11 puis 13èmes places lors de ces deux saisons.
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Le début de la fin (2014-2015)
Un gros recrutement est fait la saison suivante. Tout d’abord, Marcel Salerno, toujours président, officialise un accord avec l’AS Monaco. Les deux clubs vont ainsi collaborer concernant les prêts et échanges. Des jeunes joueurs du centre de formation monégasque rejoignent les Bouches du Rhône. Ensuite, l’AC Arles-Avignon recrute des vieux briscards : Pascal Chimbonda, Gaël Givet, Jonathan Zebina ou encore Mamadou Niang. Franck Dumas quitte le club. Bruno Irles prend alors les commandes du navire Arlésien.
Malgré ce bon recrutement, les résultats sont très décevants. Dès la huitième journée, le club est dans la zone de relégation. Début octobre, Irles laisse sa place à son adjoint Stéphane Crucet. Le premier devient alors adjoint du second, chose assez inimaginable pour un club de ce niveau.
Incapable d’inverser la tendance, le duo est remplacé fin décembre par Victor Zvunka. Les Lions n’y arrivent plus et naviguent entre la 19ème et la 20ème place. L’AC Arles-Avignon termine la saison 2014-2015 lanterne rouge du championnat de Ligue 2 avec seulement 30 points. C’est le début d’une longue déliquescence, amorcée par des choix sportifs et structurels parfois douteux.
La descente aux enfers (depuis 2015)
Relégué sportivement en National, l’AC Arles-Avignon dépose le bilan et est rétrogradé administrativement en CFA. L’entame de championnat est très difficile, avec sept défaites en autant de rencontres. La Fédération Française de Football vient mettre fin au calvaire des Arlésiens. La liquidation judiciaire du club est prononcée. L’ACA est relégué en Division d’Honneur Régionale (DHR).
En deux ans, le club passe de la Ligue 2 à la DHR. Fini le football professionnel, retour dans le monde amateur. L’AC Arles-Avignon redevient l’AC Arles en 2016 n’ayant plus besoin du Parc des Sports d’Avignon pour jouer en championnat. Retour au stade Fernand Fournier d’Arles pour les Lions. Après deux saisons en DHR, le club monte en Régional 2. Depuis, l’AC Arles vagabonde entre les divisions régionales, mais n’arrive pas à revenir à un niveau national.
En une douzaine d’années, l’AC Arles-Avignon est passé par toutes les émotions. Il y a eu, tout d’abord, cette ascension fulgurante, irrésistible et exceptionnelle, avec pour point d’orgue la saison 2010-2011 en Ligue 1. Malheureusement, à cause de mauvais choix financiers, sportifs et structurels, le revers de la médaille est arrivé aussi vite que la gloire. L’ACA est passé de la Ligue 2 à la DRH en moins de deux ans. La chute est terrible et le cauchemar est réel. Mais qui sait, les Lions rugiront peut-être un jour de nouveau.
Sources :
– Arles-Avignon : la douloureuse chute de la Ligue 1 à la R3, Café Crème Sport.
– Hadzibegic : «À Arles-Avignon, on savait tous comment cela finirait», France Football.
– Témoignages d’anciens membres de l’AC Arles-Avignon
Crédits Photos : Icon Sport