Pink Floyd est un groupe qui a révolutionné la musique comme peu d’autres. The Dark Side Of The Moon, Wish You Were Here, The Wall, Animals… tant d’albums qui ont apporté une nouvelle vision du rock dans les années 1970. Au-delà de ces succès, cette période a également été celle pendant laquelle le groupe originaire du Royaume-Uni s’est le plus investi dans son autre passion : le football.
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Au-delà du rock, des musiques iconiques et d’albums légendaires, les Pink Floyd étaient aussi une bande d’amis fans de football qui, comme chaque amoureux du ballon rond l’a fait, organisait des matchs avec d’autres équipes. C’est à la fin de l’année 1973, lors de la sortie de la compilation A Nice Pair, que les amateurs du groupe s’interrogent. Au centre de la couverture de la pochette, au milieu d’images variées, une équipe de football. Celle-ci est notamment composée des quatre membres du groupe. David Gilmour, Richard Wright et Nick Mason posent pour une photo, vêtus de tuniques bleues et blanches. Avec eux, au centre, Roger Waters est habillé en jaune, gardien de cette mystérieuse équipe.
Le Pink Floyd Football Club
C’est un club dont on connaît peu de choses, et dont certains questionnent même l’existence. Pourtant, le Pink Floyd FC a bien existé. Cette photo du « First Eleven » n’est pas mise en scène. Elle a été prise lors d’un match remporté 4-0 contre « des marxistes du Nord de la capitale (Londres) » selon Nicolas Schaffner, biographe de Pink Floyd, et auteur du livre Saucerful of Secrets. Le club a sévi partout en Europe, au rythme des tournées du groupe. Waters, Mason, Wright et Gilmour s’alliaient à certains membres de leur équipe de production pour défier toutes sortes d’équipes : d’autres groupes, des journalistes, et même des danseurs de ballet à Marseille.
Roger Waters défendait donc les buts, « un gardien courageux, avec de belles sorties aériennes » selon Schaffner. The Wall. Mason était placé en électron libre : devant les buts, derrière les autres attaquants, à gauche… « Il donnait tout, parfois trop, et sortait du terrain complètement rincé. […] Quand le groupe avait la mauvaise idée de jouer avant de faire leur concert, il lui fallait beaucoup de temps pour récupérer » écrivait Schaffner. Rick Wright et David Gilmour occupaient le côté droit. Le premier en tant que latéral, le second au poste d’ailier.
« En tournée ou en studio, ou qu’on soit, le ballon de foot nous suivait. » Roger Waters, chanteur-bassiste du groupe.
Le groupe était si fan du ballon rond qu’il ne pouvait jamais s’en passer. Cela n’a cependant jamais dépassé le stade du divertissement. « Le groupe n’avait pas d’autre objectif que celui de s’amuser en tournée, et de se lier d’amitié avec certaines personnes de la région » disait Nick Mason.
‘You’ll never walk alone’
Richard Wright était un amateur de Liverpool, seul contre tous dans ce groupe fan d’une autre équipe vêtue de rouge. Les autres membres ne cachaient pas leur amour pour les Gunners, dont ils se revendiquaient ouvertement supporters. « J’ai effectivement été abonné à Arsenal pendant quelques années. C’était aux alentours du doublé. Cependant, je ne suis pas un fan assidu : je regarde quand ils gagnent, et deviens infidèle quand ils perdent. Mais j’ai une place pour Arsenal dans mon cœur » clarifiait Gilmour. Roger Waters a quant à lui confirmé, à la fin d’une vidéo sur son compte Twitter en octobre 2016, qu’il était fan d’Arsenal.
Si le style du groupe a pu se rapprocher du blues à plusieurs reprises (A Saucerful of Secrets, The Piper at the Gates of Dawn), ce sont bien les Reds qui sont mis à l’honneur dans l’une des chansons de leur album Meddle (1971).
En effet, dans leur chanson Fearless, le groupe a samplé le fameux chant de Liverpool, You’ll Never Walk Alone. Aux alentours de la 30ème seconde et à la fin de la chanson, nous entendons le Kop chanter l’hymne des Reds. « C’est un enregistrement live, au cours d’un derby contre Everton » écrivait Mark Blake dans son livre sur le groupe : Pigs Might Fly: The Inside Story of Pink Floyd.
Pourquoi ce choix ? « Les gens sont souvent confus et ne comprennent pas pourquoi nous avons utilisé des chants de Liverpool, alors que nous étions fans d’Arsenal » disait le compte Twitter de Nick Mason. Encore aujourd’hui, cette question reste sans réponse… ou presque.
Une hypothèse se démarque des autres. Il est certain que Pink Floyd n’est pas, en majorité, fan des Reds. Ce choix de chant vient d’autre part, et très certainement d’une idée de Roger Waters. En effet, le co-compositeur de la chanson a perdu son père alors que ce dernier servait la British Army. Depuis, Waters se revendique comme socialiste et pacifiste, et grandement attaché à la ville de Liverpool, majoritairement à gauche à l’époque. Faire le choix d’une chanson composée par un groupe de la ville n’est pas anodin.
De plus, la chanson évoque la peur et l’entraide : « You say the hill’s too steep to climb. You say you’d like to see me try climbing. You pick the place and I’ll choose the time, and I’ll climb. » Ce You’ll Never Walk Alone peut également être un symbole de soutien envers Syd Barrett. En effet, le co-fondateur et leader du groupe jusqu’à son éviction en 1968 était en proie à de nombreuses addictions, affectant sévèrement sa santé. Mark Blake, dans Pigs Might Fly, n’avance pas de réponse définitive. Il estime que le côté mythique et bruyant du Kop renforçait cette chanson au message fort et positif, mais ne fait que spéculer. Aurons-nous un jour la réponse ? Difficile d’y croire, maintenant que le groupe est séparé. Oh, how I wish you were here.
L’amour de Pink Floyd envers le monde du ballon rond n’a jamais été un secret. Le groupe a toujours été ouvert sur le sujet, et certains membres ont été vus au stade de Highbury à de nombreuses reprises. Néanmoins, pas question de s’acheter une équipe de football comme évoqué dans Money : « New car, caviar, four star daydream, think I’ll buy me a football team« . Au lieu de cela, le groupe a préféré en créer une.
Sources :
- Eric Maggiori, « L’histoire psychédélique du Pink Floyd FC », So Foot
- Gabriel Cnudde, « Pink Floyd, Fearless et You’ll Never Walk Alone », So Foot
- Mark Blake, Pigs Might Fly: The Inside Story of Pink Floyd, 2007
- Nick Mason, Pink Floyd : l’histoire selon Nick Mason, 2004
- Nicolas Schaffner, Saucerful of Secrets
- Richard Coudrais, « Another kick in the ball », Footichiste
- « The Pink Floyd Flootball Club », Ironbell