La rivalité dans le football est l’un des éléments qui permet de faire vibrer tous les amateurs du ballon rond. Entre le Real Madrid et le FC Barcelone, la rivalité est particulièrement intense. Les supporters se détestent tellement qu’ils ne se considèrent non plus comme de simples adversaires, mais comme de vrais ennemis. Pourtant, de temps en temps, certains font acte de fair-play et s’inclinent devant la grandeur d’un joueur adverse en lui accordant le plus grand des honneurs : une standing ovation et des tonnerres d’applaudissements. Lors d’un Clasico, Diego Maradona est le premier joueur du FC Barcelone qui a réussi à se faire lever le Bernabéu. Un moment légendaire qui n’a été reproduit que 20 ans plus tard, lorsqu’une autre légende du football foule la pelouse des Galacticos. Nous sommes le 19 novembre 2005, et Ronaldinho arrive au Bernabéu en conquérant. Il ne repart qu’après avoir fait des joueurs adverses ses victimes, de leur stade sa maison, de leurs supporters ses admirateurs.
Un mensonge familial
L’histoire qui suit est unique et rassurante. Elle est racontée dans l’autobiographie d’Andrès Iniesta, coéquipier de Ronaldinho au Barça, qui partage le stratagème mis en place par Ronnie pour tester ses coéquipiers. Quelques jours avant le Clasico, en pleine nuit, Iniesta reçoit un appel glaçant de Ronaldinho.
« Andrés, je sais qu’il est trois heures du matin, mais je dois te confier quelque chose. En juin, je vais quitter le Barça. Mon frère a un accord avec le Real Madrid. C’est une offre incroyable, je ne peux pas refuser. Tu es jeune, tu peux comprendre… Mais s’il te plait, ne le dis à personne au club, ne me trahis pas. Je te fais plus confiance qu’à quiconque. Andrés, bonne nuit. »
Sur ces mots, Andrès est laissé seul et n’a pas le temps de parler. Il doit se faire à l’idée que son ami, numéro 10 et symbole du club, va rejoindre l’éternel rival contre qui le FC Barcelone joue dans moins d’une semaine. Le lendemain et les jours qui suivent, l’ambiance à l’entraînement est étrange, personne ne parle et une certaine tension règne. Le jour du Clasico, dans les vestiaires, même constat : une certaine impression que tout le monde sait quelque chose qu’il ne peut pas dire pour ne pas gâcher ce match. Ronaldinho brise finalement le silence en prenant la parole, quelques minutes avant le coup d’envoi.
« Aujourd’hui, nous avons un match très important, ils sont forts, mais ces derniers jours, j’ai découvert que nous étions comme une famille. Je vous ai tous appelés durant la nuit et je vous ai dit que je partais en juin, mais personne n’a parlé. Après ça, j’ai réalisé que nous étions prêts à souffrir en silence plutôt que se trahir. Je resterai là pour longtemps. Maintenant, allons sur le terrain et donnons une leçon à ces joueurs du Real. »
Un match pour l’histoire
Après ce message positif, l’équipe veut en découdre. Ce soir, le FC Barcelone doit repartir vainqueur et conquérir la pelouse des merengue. Ils entrent sur la pelouse des Galacticos en grands favoris. Même s’ils n’ont qu’un point d’avance sur leurs rivaux et qu’ils jouent à l’extérieur, les barcelonais semblent plus en confiance pour ce match si important. Le collectif catalan doit faire face aux individualités légendaires madrilènes. Deux visions du football s’opposent, et le stade est prêt à s’embraser pour soutenir la sienne. « Dans mon jeu, il y a 90% d’improvisation » avait un jour déclaré Ronnie. Ce soir-là, le brésilien semble particulièrement imaginatif : dès le début de la rencontre, il s’amuse avec Salgado qu’il mystifie sans pitié. Ronaldinho, dans ce début de match, paraît intouchable. Tellement intouchable que toute l’équipe du Real se concentre sur lui… sans se soucier d’un certain Lionel Messi qui, depuis son côté droit, parcourt une grande partie du terrain avant de servir Samuel Eto’o, qui ouvre le score sans laisser la moindre chance à Casillas. Le cauchemar commence pour les madrilènes, même s’ils parviennent à tenir le score jusqu’à la mi-temps, rentrant avec un petit but de retard et pleins d’espoirs en tête. Ces espoirs sont vains. Si Ronaldinho était excellent en première mi-temps et montrait de sublimes gestes techniques, il manquait encore cruellement d’efficacité. Pourtant, au retour des vestiaires, le stade comprend vite : Ronnie est là pour en découdre, et rien ne peut plus l’arrêter. Le Barça revient en conquérant sur la pelouse et domine les quinze premières minutes de cette deuxième période, jusqu’à ce que le Real ne se montre menaçant aux alentours de la 60ème minute. Ronaldinho prend alors les commandes et scelle le sort du Real. Depuis le milieu de terrain, l’international Brésilien parvient à remonter tout le terrain, passant au milieu d’un champ de madrilènes. Le pauvre Sergio Ramos ne peut rien faire pour l’arrêter et est laissé sur place, humilié, avant de voir son coéquipier Helguera subir le même sort. Ronaldinho, seul face à Casillas, ne lui laisse pas le temps de réagir et conforte l’avance du Barça, marquant le but du 2-0. Le stade, jusqu’ici un volcan grondant, est forcé de s’éteindre et de regarder son équipe se faire humilier. Un quart d’heure plus tard, Ronaldinho enterre définitivement les rivaux de toujours. Depuis son côté gauche, il enchaîne les passements de jambes et retombe une nouvelle fois face à Sergio Ramos, qui finit à nouveau humilié. Le brésilien frappe et le temps s’arrête. Casillas voit le ballon et sait déjà qu’il ne pourra pas le stopper. Pendant une infime seconde, le Bernabéu retient son souffle… avant d’exploser complètement lorsque le ballon fait trembler les filets. La moitié du stade se lève et applaudit la performance extraordinaire du Blaugrana, tandis que l’autre moitié agite des mouchoirs blancs. Ronaldinho s’offre quelque chose de bien plus fort que n’importe quel trophée : une standing ovation des supporters du club rival, symbole de domination totale. L’histoire est écrite.
Une philosophie à contre-courant
A cette époque du football, la philosophie du beau jeu est loin d’être la dominante. Le football connaît une ère de cynisme général, privilégiant la victoire à tout prix. Si les Galacticos sont réputés pour être excellents individuellement, ils ne veulent pas faire de spectacle : ce qu’ils veulent, c’est gagner. Pourtant, certains joueurs comme Ronaldinho, Zidane ou même Messi, permettent à cette époque de faire perdurer un football beau à voir et pleins de gestes techniques, de jeu collectif, de grandes performances. Toutefois, rares sont les joueurs qui continuent de jouer un football pur et dur, faisant passer la technique et le spectacle avant la gagne, ou qui, plus précisément, les font cohabiter. Pour Ronaldinho, cela va de soi : gagner et bien jouer sont deux choses qui peuvent concorder, et sa performance ce soir-là le prouve complètement. Seul contre tous, il continue de jouer le même football toute sa carrière et n’arrivera jamais à s’adapter à ces quelques années de jeu défensif. Sur le terrain ce soir-là, Ronaldinho prouve qu’il est l’un des plus grands. Tel un adolescent et ses petits frères de cinq ans dans son jardin, il s’amuse avec le ballon et fait de ses adversaires ses victimes, les humiliant un à un chez eux. Le message est fort : chez son grand rival, le joueur du FC Barcelone ne s’adapte pas et force ses adversaires à souffrir et à tomber sous ses dribbles. Omniprésent, technique, collectif, spectaculaire : Ronaldinho éloigne tous les clichés entourant le football de l’époque et continue d’émerveiller tous ses amateurs, et ce avec son éternel sourire.
C’est par sa virtuosité, son élégance et sa bienveillance que Ronaldinho a pu conquérir le stade de ses éternels rivaux, mettant à ses pieds pendant toute une mi-temps l’une des équipes les plus fortes de l’histoire du Real Madrid, les Galacticos. Grâce à cette victoire, le FC Barcelone s’offre une avance qu’il ne perdra plus et remporte un deuxième titre consécutif en Liga. Ronaldinho, lui, gagne le Ballon d’Or une dizaine de jours après ce match dantesque. Il est l’un des derniers joueurs de football à avoir su garder son sourire dans toutes les circonstances possibles, même à l’heure d’un match historique comme le Clasico. Comment ne pas l’aimer ? Sa joie de vivre et son style conquérant resteront à jamais dans l’histoire car, grâce à eux, il a pu accomplir quelque chose d’unique : unifier.
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