Indéniablement l’un des stades les plus mythiques du monde, le « Théâtre des Rêves » doit son surnom à l’une des plus grandes légendes de l’histoire de Manchester United : Sir Bobby Charlton. Un surnom parfaitement trouvé pour une enceinte qui aura accueilli des évènements cruciaux de l’histoire du football et du sport : matchs historiques, compétitions mondiales, compétitions féminines… retour sur plus de 110 ans d’histoire entre les murs d’Old Trafford.
Créé en 1909, le Théâtre des Rêves est l’hôte des matchs de Manchester United depuis 1910. Cependant, de 1941 à 1949, les Red Devils seront délocalisés sur le terrain de leur voisins citizens, Maine Road, à la suite de bombardements allemands le 22 décembre 1940 et le 11 mars 1941, qui détruisent l’immense majorité du stade. Le 27 août 1949, les hostilités reprennent à Old Trafford, qui commence à écrire sa légende. Depuis sa création, le stade de Manchester United ne cesse de réduire ses capacités d’accueil. De 80 000 places à l’origine, l’antre des Mancuniens va jusqu’à accueillir 44 000 places en 1990, lorsqu’une mesure gouvernementale oblige les stades à convertir toutes leurs places en places assises. Finalement, le stade doit s’adapter aux performances du club qui parvient à se hisser à la tête de l’Angleterre et de l’Europe, et de nombreux travaux commencent alors.
Accueillant des matchs de l’Euro 1996, la finale de la Ligue des Champions 2003 et de nombreux évènements à notoriété mondiale, le stade continue de grandir en conséquence jusqu’à sa dernière expansion entre 2005 et 2006, qui nous amène à la version du stade que nous connaissons aujourd’hui, avec ses 75 731 places. Le Théâtre des Rêves a accueilli de nombreux évènements inoubliables qui ont contribués à son mythe. Des hommes emblématiques du club ont désormais leur propre tribune dans le stade : Sir Bobby Charlton lui-même ainsi que Sir Alex Ferguson depuis 2011. Quant à Denis Law et George Best, ils ont une statue à leur effigie aux abords de l’enceinte, aux côtés de l’homme qui a fait la légende du Théâtre des Rêves.
L’un des évènements les plus marquants du club est également le plus tragique : l’accident d’avion, en 1958, de l’équipe de Manchester United, les Busby Babes. Cet accident a donné lieu à de nombreux hommages en l’honneur des légendes du club, et une horloge géante – l’horloge de Munich – figure dans le stade depuis le 6 février 1968, bloquée à l’heure du crash de l’avion : 15h04.
D’autres évènements, plus glorieux et en rapport direct avec le gazon, ont permis à Old Trafford de devenir le stade mythique qu’il est aujourd’hui.
La Coupe du Monde 1966 et l’Euro 1996, et le monde découvrit le Théâtre des Rêves
Lors de la Coupe du Monde 1966, située en Angleterre et remportée par les hôtes, ce sont les stades de Wembley et d’Old Trafford qui reçoivent les meilleurs critiques de la presse. D’un côté, le stade aux ‘Twin Towers‘, qui a accueilli tous les plus gros matchs de la compétition. De l’autre, le futur ‘Théâtre des Rêves’, qui n’accueillit que trois matchs de poules… suffisants pour susciter l’intérêt de tous.
Bien en-dessous de Wembley et de l’aura que le stade de Londres avait, Old Trafford n’était pas encore le Théâtre des Rêves. La sensation provoquée dans la poule C par le Portugal d’Eusébio et la Hongrie, vainqueurs du groupe devant la Bulgarie et, surtout, le Brésil, ont contribué à l’engouement général autour du stade. En trois matchs seulement, les filets du stade ont tremblé onze fois : suffisamment pour que les supporters des différentes sélections soient transcendés par les matchs de ce groupe, surtout grâce au parcours du Portugal qui, derrière, ira chercher une troisième place et une médaille de bronze. Pas encore au niveau de Wembley cependant, l’Euro 1996 viendra enrichir la légende du stade.
L’Euro 1996 participera donc au changement de dimension du Théâtre des Rêves : lors de ce mois de juin qui verra l’Allemagne soulever le trophée, Old Trafford accueille cinq matchs : c’est le deuxième stade à en accueillir autant sur toute la compétition, Wembley restant devant et lieu de la finale.
Old Trafford héberge alors la moitié des matchs de la « poule de la mort » de cet Euro : l’Italie, la Russie, le vainqueur allemand et le finaliste tchèque, et accueille chaque match de groupe de l’Allemagne. Forcément, ce succès participe à la légende d’Old Trafford. Le groupe C est, de loin, le plus relevé de toute la compétition, et c’est dans l’antre des Red Devils que les Allemands ont commencé leur épopée vers le trophée. C’est encore à Old Trafford qu’ils se débarasseront de la Croatie en quarts de finale, avant que le Théâtre des Rêves n’accueille la défaite de la France face à la Tchéquie en demi-finale.
A la suite de cet Euro, en 2000, le stade de Wembley est démoli afin de laisser place à une toute nouvelle enceinte, en prévision des jeux Olympiques de 2012. Ce sont ces années qui permettent à Old Trafford de devenir le stade le plus mythique du Royaume-Uni, bien que d’autres stades légendaires aient leur place au nord de la Manche. Avant cette démolition, le Manchester United de Sir Alex Ferguson réussit un exploit qui, aujourd’hui, est encore inégalé : le triplé championnat – Ligue des Champions – coupe d’Angleterre.
Le triplé de 1999 : un exploit qui a contribué au mythe d’Old Trafford
Difficile, impossible de parler de l’antre des Red Devils sans parler du plus grand succès de leur glorieuse histoire. Lors de la saison 1998-1999, les hommes d’Alex Ferguson n’ont subi qu’une seule défaite à domicile sur les trois compétions qu’ils ont remportées. Hormis cette victoire de Middlesbrough dans l’enceinte mancunienne, le club de Manchester a toujours su faire le nécessaire pour arracher un nul ou une victoire dans son théâtre.
C’est notamment en demi-finale de Ligue des Champions que les 55 000 spectateurs ont su participer au retournement de situation, sauvant les Mancuniens d’une défaite contre la Juventus de Zinédine Zidane, Alessandro Del Piero et bien d’autres. C’est peut-être le but le plus important de la saison dans l’enceinte des Red Devils : les Anglais n’avaient jamais gagné sur le sol de Turin, et ce missile de Ryan Giggs sur un centre en bicyclette de David Beckham a été décisif, psychologiquement, pour les hommes de Ferguson. Cette égalisation à la 92ème minute ayant provoqué le vrombissement d’Old Trafford a rappelé aux joueurs qu’ils étaient suivis par d’innombrables fans. Grâce à ce déclic, les Mancuniens trouvèrent la force d’aller l’emporter sur le sol bianconero et de se hisser en finale pour y remporter le match de leur vie.
En championnat, le stade était à guichets fermés à absolument chaque match. Limité à 55 000 places à cette époque, Old Trafford était plein à craquer, explosant à chaque but décisif. Dwight Yorke en profite pour faire la saison la plus prolifique de sa vie : l’international de Trinité-et-Tobago marque 29 buts sur la saison toutes compétitions confondues, devant les 24 buts d’Andy Cole. Il est également le meilleur passeur du groupe avec 18 passes décisives.
Pourtant, lors de la dernière journée de championnat, alors que Manchester United était en tête depuis trois journées consécutives à un point d’Arsenal, les événements prennent une tournure dramatique. Les Spurs marquent et prennent l’avantage, amenant temporairement leurs rivaux de toujours au sommet du championnat. Il faudra attendre la 43ème minute pour que David Beckham égalise et relance les espoirs mancuniens. Au retour des vestiaires, c’est Andy Cole qui fera exploser Old Trafford en donnant l’avantage – et le titre – à son équipe. Le Théâtre des Rêves ne porta jamais aussi bien son nom : dans les tribunes, le stress et la tension sont à leur comble et le public fait trembler les murs d’Old Trafford. Le score ne change finalement pas, et Manchester United est sacré champion d’Angleterre dans son stade, se prenant à rêver d’un triplé encore accessible. Tout un symbole.
Une seule défaite à domicile, des matchs aux scénarios complètement fous et un résultat bien au-delà des attentes : la saison de Manchester United restera dans la légende à jamais, et celle d’Old Trafford également.
Juventus – AC Milan 2003, une finale italienne de légende
L’une des finales de Ligue des Champions les plus emblématiques du XXIème siècle a bien eu lieu dans l’enceinte des Red Devils. Juventus – AC Milan, les deux rois du calcio de l’époque.
Quelques jours avant la rencontre, et ce pendant 24h, un match de football de plus de 1000 joueurs – le « Starball Match » – fut joué dans le Square Albert de Manchester, opposant l’Internazionale Manchester au Real Mancunian, (noms choisis en référence aux deux clubs éliminés par les finalistes, l’Inter et le Real Madrid) et se finit sur un score de 252 – 162. Un évènement qui a grandement participé à la mise en lumière de la ville de Manchester et de l’antre des Red Devils, qui allait bientôt devenir le Théâtre d’une finale historique.
Peu après l’expansion d’Old Trafford, le stade accueillait la première finale de compétition européenne majeure de son histoire. Et quelle finale. La Juventus venait de sortir le Real Madrid et le FC Barcelone, tandis que Milan s’était débarrassé de l’Ajax et de l’Inter, autre cador italien. L’absence de Nedved. Les 63 000 spectateurs. Ancelotti contre Lippi. L’arrêt de Buffon. Les prolongations. Les tirs au but. La sixième coupe aux grandes oreilles des Rossoneri, portés par un Paolo Maldini flamboyant. Les amoureux du football et de l’Italie se sont donnés rendez-vous dans le Théâtre des Rêves, qui a rarement aussi bien porté son nom : deux équipes en quête du plus grand trophée européen après des parcours sensationnels, deux équipes qui dominent leur championnat et qui s’affrontent dans un match au sommet. On trouvera difficilement plus grand enjeu. Après une finale sans but, des blessures des deux côtés forçant les deux équipes à finir à dix joueurs et des occasions manquées de part et d’autre du terrain, les hommes emmenés par Lippi et Ancelotti se retrouvent en prolongation, au pied du mur devant un Old Trafford bouillant.
Après une séance de tirs au but pour le moins controversée – les gardiens Gianluigi Buffon et Dida sont accusés de s’être placés devant leur ligne à chaque penalty arrêté – Shevchenko vient crucifier les Bianconeri et offrir à l’AC Milan la sixième Ligue des Champions de son histoire. Le contexte et les protagonistes ont grandement contribué à la légende d’Old Trafford, qui en plus d’être l’antre d’un club mondialement connu, est un stade capable d’accueillir de tels événements.
Old Trafford est de toute évidence l’un des stades les plus mythiques de notre sport. Ayant accueilli d’immenses compétitions internationales, disposant d’une note de 5 étoiles selon l’UEFA – le seul stade en Angleterre à ce jour – et ayant fait la légende d’hommes tels que Bobby Charlton, Alex Ferguson ou Denis Law… le Théâtre des Rêves ne pouvait pas mieux porter son nom. Aujourd’hui encore, les jeunes fans de football rêvent de mettre les pieds dans cette enceinte et d’en fouler la pelouse. Avant eux, les joueurs les plus célèbres de l’histoire du ballon rond l’ont fait. Old Trafford permet à chaque joueur et amateur de football de rêver.
Sources :
- Blogparkinn, The history of Manchester’s Old Trafford.
- Man Utd France, Old Trafford.
- Old Trafford, 100 years of the Theatre of Dreams, Ian Marshall, 2010.
- SoFoot, Les dix matchs de légende de Manchester United.
- The Old Trafford Encyclopedia: A-Z of Manchester United, Stephen F. Kelly.
Crédit photos : Icon Sport