Vous les avez entendus, vous les avez chantés, ils vous donnent parfois envie de rire, de pleurer, de sauter, ils vous donnent de l’espoir et vous empêchent parfois de dormir à force de les chantonner à longueur de journée. Ils réunissent les fans du football, les chants des supporters.
Si certains sont des réadaptations de chants populaires à la musicalité entraînante et presque additive tels que les nombreuses reprises du son originel Oh when The Saints Go Marching In, d’autres sont écrits spécialement pour les clubs et nous invitent, le temps d’un instant, à voyager dans leur histoire.
Si en cette année 2019 Tottenham vivait pour la première fois de son histoire la finale de la Ligue des Champions, ces derniers sont, au contraire, de grands habitués des finales de FA Cup (Coupe d’Angleterre) et en cumulent aujourd’hui 8, autant que Chelsea et juste derrière Manchester United (12) et Arsenal (13).
Envolons nous à Londres, en mai 1981.
Quatorze ans après leur dernière victoire en FA Cup Tottenham est de retour en finale face à Manchester City. Les fans, qui chantonnent déjà depuis les années 60 le fameux Glory, Glory, Tottenham, reprise de la chanson originelle Glory Glory Hallelujah, découvrent, durant l’événement de 1981, le swing énergique d’Ossie’s Dream.
La mélodie composée par le duo de pop rock anglais Chas Hodges et Dave Peacock (Chas&Dave) nous permet d’en apprendre un peu plus sur le club et ses joueurs de la saison alors en cours :
En premier lieu, le titre de la chanson fait évidemment référence au footballeur international argentin Osvaldo Ardiles – surnommé Ossie – arrivé au club en 1978, à l’âge de 26 ans et relate son rêve de toujours : jouer au stade de Wembley. En effet, ce mythique stade londonien accueille la plupart des finales des compétitions nationales depuis son inauguration en 1923. En 1948 il accueillera même les Jeux Olympiques ainsi que la finale de la Coupe du Monde de football de 1966. Le footballeur brésilien Pelé ira même jusqu’à surnommer le stade du « Temple du football ».
L’arène d’origine est démolie en 2003 et en 2007 une nouvelle enceinte est construite. Elle permet au stade anglais, désormais surnommé le « New Wembley Stadium » – afin de le distinguer de l’ancienne structure – d’accueillir jusqu’à 90 000 spectateurs. Il devient dès lors le plus grand stade du Royaume-Uni et le deuxième plus grand stade d’Europe, uniquement devancé par le Camp Nou de Barcelone (99 354 sièges).
Les compositeurs Chas&Dave durent persuader le jeune argentin Oslavdo (Ossie) de chanter lui même une ligne de la chanson alors que ce dernier était réticent en raison de sa difficulté à prononcer « Tottenham » (1:55). Encore aujourd’hui les fans écoutent ce passage avec amusement et nostalgie.
Le refrain, presque entêtant, quant à lui ne manque pas de faire référence au chant populaire Oh when The Saints Go Marching In, modifié par « When the Spurs go marching home », apportant ainsi un aspect très solennel et très sacré à cette joyeuse rengaine.
Les Spurs sortent finalement vainqueur de cette compétition nationale pour la 6e fois de leur histoire grâce au but historique de l’argentin Ricardo Villa à la 76e minute face à Manchester City (3-2) lors du match replay.
Les joueurs du White Hart Lane, stade officiel de l’équipe des Spurs de 1899 à 2017, ramènent la coupe à la maison. Le rêve d’Ossie est devenu réalité.
Cette même année le tube atteint la 5e place du classement des singles britanniques et est aujourd’hui encore considéré par les Spurs comme un chant de supporter emblématique du club.
Londres, mai 1982.
Tout juste un an après leur victoire, l’équipe de Tottenham est de retour en finale sur la pelouse de Wembley face à Queens Park Rangers. Encore une fois l’équipe se donne à coeur joie de chanter, toujours accompagnée par le duo Chas & Dave, leur nouvel hymne : Tottenham Tottenham (Come on you Spurs) .
Les paroles, presque railleuses mais à l’air jovial, rappellent sans équivoque leur victoire de l’année passée (« Tottenham Tottenham / No one can stop them / We’re gonna do it like we did last year »). Si cette fois le son ne fait pas référence à leur entraineur Keith Burkinshaw, l’allusion au joueur Ossie est toujours présente, alors que ce dernier joue sa dernière saison chez les Spurs avant d’être prêté au Paris Saint-Germain.
Enfin, d’après les paroles, « Stevie », faisant référence à Steve Perryman, capitaine de l’équipe de 1981, avait hâte de soulever la coupe à nouveau (« Stevie can’t wait to hold the cup again »). Légende du club, Steve compte à lui seul 655 matchs de championnat avec les Spurs – record de l’époque – et 866 matchs en comptant les coupes. Cette même année il est élu joueur de l’année par la Football Writers’ Association. Lors d’une interview il dira avec humilité que son unique rôle de latéral droit « se limitait à passer le ballon à Glenn Hoddle qui faisait le reste. »
La chanson se révèle prémonitoire car l’équipe est à nouveau vainqueur de la compétition grâce à un but à la 6e minute, sur penalty, de Glenn Hoddle, joueur également emblématique de l’équipe.
Le tube atteint la 19e place du classement des singles britanniques quelques mois après la finale.
Si les chansons de Chas & Dave s’avèrent être de véritables porte-bonheur en finale de FA Cup en 1981 et 1982 pour les Spurs, l’année 1987 est témoin de leur défaite face à Coventry City. (3-2). Enfin, le duo composera en 1991 leur dernière chanson pour l’équipe, remerciant, non sans moquerie, Arsenal pour leur avoir permis de retourner en finale ( We’re Off To Wembley ‘Cos We Beat The Arsenal ). Ils gagnèrent la FA Cup pour la dernière fois de leur histoire cette année là.
Pour les supporters les plus férus de Tottenham, en 2012 est sorti un album intitulé Chas N Dave Sing The Anthems of White Hart Lane, regroupant 7 de leurs chansons écrites pour le club londonien.
Il semblerait toutefois aujourd’hui que l’hymne « officiel » retenu par les fans soit l’originel Glory, Glory, Tottenham Hotspurs : des paroles simples, répétitives, à l’air enjoué mais presque cérémonieux, qui accompagne solennellement l’équipe anglaise vers le « champ de bataille ».
Depuis la finale de FA Cup de 1983, cette même chanson est aussi l’hymne officiel de Manchester United (Glory Glory Man United). Si ce choix peut paraître peu original, la chanson semble porter chance à ManU, club au palmarès le plus important du football anglais.
In fine, bien que certaines équipes aient des hymnes officiels, comme l’emblématique You’ll never walk Alone de Liverpool, la liste des chants de clubs est généralement (très) longue et non exhaustive : qu’il s’agisse de reprises, de simples rengaines de supporters ou de chansons officiellement composées pour les clubs, vous trouverez nécessairement la mélodie qui fera chavirer vos tympans.