Quand on pense aux numéros dix français, Kopa, Cantona, Platini et Zidane sont souvent les noms qui ressortent. Pourtant, ces quatre là ne sont pas les seuls Français à avoir brillés à ce poste de meneur de jeu. Il y aussi eu Johan Micoud, un véritable esthète balle aux pieds. Retour sur la carrière de celui que les Allemands surnommaient « Le Chef ».
Johan Micoud naît le 24 juillet 1973 à Cannes. Enfant, il se passionne pour l’art. Et plus particulièrement pour la peinture. Très tôt, il développe une âme d’artiste, que l’on retrouvera quelques années plus tard dans sa deuxième passion… le football.
Dès son plus jeune âge, Johan Micoud souhaite jouer au football. Ses parents l’inscrivent donc dans le club de sa ville, l’AS Cannes. Un choix judicieux puisque le garçon s’épanoui rapidement et pleinement au sein de ce club. Essayé à différents postes au sein des équipes de jeunes, Johan trouve enfin sa voix à l’adolescence. Le jeune homme veut être le meneur de jeu, le numéro dix de l’équipe. Et cela tombe bien, son excellente vision du jeu et sa qualité technique au-dessus de la moyenne le lui permette.
A ce poste de numéro dix, le Français devient très vite un élément fort du centre de formation cannois. D’année en année, il progresse. Et impressionne tous ses formateurs. C’est le cas de Guy Lacombe, qui comprend assez vite que Johan a quelque chose de spécial en lui. Et pour cause, dès que le jeune homme touche le cuir, la magie opère. Il n’est en fait pas qu’un simple joueur de football, c’est un artiste.
Une intégration express
Au mercato estival 1992, l’AS Cannes doit se renforcer. En effet, le club azuréen doit faire face au départ de son milieu offensif, un certain Zinédine Zidane. Le futur Ballon d’Or est déjà trop fort pour son club à l’époque. Il s’engage alors à Bordeaux pour une faible somme d’argent. Pour le remplacer, la tâche n’est pas simple. La santé financière de l’AS Cannes n’est pas optimale et les dirigeants du club disposent de peu de moyens pour trouver un remplaçant. C’est finalement, Erick Mombaerts, l’entraîneur, qui trouve la solution à ce problème. Le coach français décide de se tourner vers son centre de formation et fait confiance à Johan Micoud.
Après avoir effectué toutes ses gammes à l’AS Cannes, Johan Micoud se voit naturellement récompensé de tous ses efforts. Il intègre ainsi le groupe professionnel pour la saison 1992/1993. Dès ses premiers entraînements, le prodige impressionne. Sa justesse et sa science du jeu font rapidement de lui une solution viable pour le poste de meneur de jeu. A dix-neuf ans, il gagne progressivement sa place et connaît ses débuts professionnels avec son club fétiche. A cette époque là, l’AS Cannes évolue alors en seconde division.
Pour sa première saison professionnelle, Johan Micoud réalise un exercice très encourageant pour la suite de sa carrière. Régulièrement titulaire, il participe à vingt-huit rencontres et inscrit ses premiers buts professionnels. Malgré son jeune âge, le maestro prouve déjà sa maturité au cours de cette saison. Puisqu’en effet, il doit faire face au départ d’Erick Mombaerts, coach qui l’avait lancé pour la première fois. Mais, le natif de Cannes s’adapte très vite aux nouvelles consignes de son nouveau coach, Luis Fernandez. Et très vite, il devient aussi un joueur important aux yeux d’El Machote.
Sous les ordres du Français, les Cannois terminent la saison en trombe et décrochent une belle seconde place de leur groupe, synonyme de barrages pour la montée. Lors de cette période, Luis Fernandez renouvelle sa confiance envers son jeune joueur en le faisant participer à cinq rencontres sur les six disputées par l’AS Cannes. Un choix payant pour le coach français puisque Johan inscrira un but important au cours de ces barrages et contribuera à la montée de son club de cœur dans l’élite.
Des débuts prometteurs en première division
Après sa promotion, l’AS Cannes se retrouve donc en D1 lors de la saison 1993/1994. Johan Micoud est toujours au club et compte bien s’appuyer sur son expérience de la saison passée pour devenir un élément fort de son équipe.
Ambitieux, le passage en première division n’est qu’une simple étape dans la carrière du jeune crack. Malgré la pression et les attentes fortes autour du club , le Français ne concède rien. Comme à son habitude, il aborde les matchs avec plaisir et déterminisme. A vingt ans, Johan participe à son premier match dans l’élite lors de la victoire deux à un à Saint-Etienne. Auteur d’une prestation spectaculaire, le Cannois prouvent directement à tous les suiveurs français, qu’il est préparé pour jouer au plus haut niveau.
Après ce match, il devient un homme clé de son équipe et enchaîne alors les prestations de haute volée. A tel point qu’à la fin de saison, Johan comptabilise un total de trente quatre matchs disputés. Aux côtés de Patrick Vieira, il contribue grandement à la qualification de son club en coupe d’Europe. Une belle surprise pour les supporters cannois qui s’attendaient plutôt à jouer le maintien en début de saison.
Les performances en club du milieu offensif ne passent pas inaperçu. Il tape dans l’œil du sélectionneur de l’équipe de France espoir qui décide de le récompenser par une convocation pour le tournoi de Toulon 1994. Une belle opportunité pour Micoud de se montrer dans ce tournoi réputé pour accueillir les futurs stars du ballon rond. Buteur à deux reprises, le jeune numéro dix réalise un très bon tournoi. Il est d’ailleurs l’un des principaux artisans, avec Grégory Coupet, de la belle troisième place des Bleuets.
La découverte de la coupe d’Europe
Après sa belle saison, Johan Micoud reçoit de nombreuses sollicitations. Il hésite pendant un temps à partir, mais décide finalement de rester à l’AS Cannes. Dans le club azuréen, le milieu français se sent bien et continue sa progression.
Lors de la saison 1994/1995, il participe ainsi à la coupe d’Europe avec son club. Un rêve de gosse qui lui réussit plutôt bien. En effet, le jeune talent ne met pas beaucoup de temps à s’adapter aux exigences européennes. Il participe notamment à la victoire neuf à un contre le Fenerbahçe lors du premier tour de la Coupe de l’UEFA. Au terme d’une campagne aboutie, le parcours du club français s’arrête finalement en seizième de finale de la compétition.
Dans l’ensemble, Johan Micoud réalise une saison pleine. Il connaît désormais bien le championnat, et cela se ressent dans ses prestations. Le Français est de plus en plus efficace, et termine la saison avec sept buts au compteur.
L’année suivante, la saison individuelle de Johan Micoud est en revanche plus compliquée. Malgré des statistiques correctes, le métronome ne peut sauver la médiocre saison de son club, qui termine à la quatorzième place du championnat. En Coupe de la Ligue, les Azuréens atteignent tout de même les demi-finales avant de s’incliner deux à zéro face à l’Olympique Lyonnais. Un club que Johan recroisera à plusieurs moments importants de sa carrière…
Johan Micoud – Zinédine Zidane, destins liés
Le mercato estival 1996 est animé. La star du football français, Zinédine Zidane, quitte Bordeaux pour rejoindre la Juventus. Pour le remplacer, les dirigeants bordelais sont à la recherche d’un joueur ayant le même profil que lui. Un pur numéro dix. Et une nouvelle fois, les destins de Zizou et de Micoud se croisent. Bordeaux jette son dévolu sur l’artiste cannois et le signe dans la foulée.
« Quand je reviens à Bordeaux c’est la saison où Dugarry, Lizarazu, Zidane partent, donc il faut tout reconstruire l’équipe. Alors, je prends Micoud à Cannes, pour le mettre en remplacement de Zizou. Finalement, je ne sais pas si c’est à cause de ça, mais bizarrement, après, ça lui a collé à la peau » déclare quelques années plus tard Roland Courbis pour expliquer son choix sur les ondes de RMC.
Remplacer Zizou n’est pas simple. Mais Micoud l’a déjà fait à Cannes. Et il semble à nouveau prêt pour accomplir sa tâche. Comme à son habitude, il s’adapte facilement à son nouvel environnement. En Gironde, le dix est à l’aise sur le terrain, plus que jamais. Et cela se ressent dans ses prestations. Lobs, coup-francs, frappes enveloppées, le numéro dix brille au sein du collectif girondins. Et en quelques semaines, il devient un des hommes forts des Marines.
Le Français participe à trente-six matchs pour sa première saison. Et contribue par ailleurs à la belle quatrième place des Girondins en championnat. Il prend également part au beau parcours du club bordelais en Coupe de la Ligue. Les hommes de Courbis parviennent à se hisser en finale, mais échouent finalement aux portes du titre. Favori, les bleus et blancs s’inclinent aux tirs au but face à Strasbourg. Un véritable coup de massue pour Johan et les siens.
Après cet échec, la pépite française est remontée comme jamais. Micoud aborde la saison suivante avec une forte ambition. Pour ce nouvel exercice, son coach décide de le positionner un cran plus haut. Un choix fort, qui favorisera l’éclosion du joueur. « Je joue plus haut que par le passé, je suis plus à l’aise » déclare le milieu bordelais après quelques journées. Désormais positionné en meneur de jeu, derrière Papin, Laslandes et Wiltord, Johan démarre la saison sous les chapeaux de roue. Décisif, le Bordelais réalise une excellente saison. Il termine la saison avec douze passes décisives à son compteur, faisant de lui le meilleur dans ce domaine en première division.
En Coupe de la Ligue, les Girondins réalisent un nouveau beau parcours. Pour la seconde année consécutive, ils se retrouvent en finale. Cette fois, ils doivent faire face au Paris Saint Germain. Une occasion idéale pour Johan et les siens de tirer un trait sur leurs mauvais souvenirs de la saison passée. Si, cette fois-ci, les Bordelais entament bien leur match en ouvrant le score grâce à un but de son virtuose, ils sont finalement rejoints par les Parisiens. Et donc une nouvelle fois, c’est aux tirs au but que les deux équipes se départagent. Peut-être rattrapés par leurs fantômes, les Girondins échouent une nouvelle fois. Une catastrophe pour Johan Micoud qui doit encore attendre pour espérer remporter son premier titre.
Johan Micoud enfin récompensé
La saison 1998/1999 est celle de la réussite pour les Girondins de Bordeaux. Johan Micoud et Ali Benarbia, souvent alignés tous les deux, excellent ensemble. Le duo de magiciens enchaînent les prestations de haut vol et permet aux bleus et blancs de réaliser une de leur plus belle saison. Au terme d’un duel épique avec l’Olympique de Marseille, qui occupera toute la saison, ils décrochent le titre de champion de France. Une délivrance pour le dix français, lui qui était passé si proche d’un trophée à plusieurs reprises.
Acteur majeur en première division, Johan Micoud réalise aussi une campagne européenne de grande classe, en inscrivant trois buts et en illuminant la planète football de ses gestes hors du commun. Après un beau parcours, le club de Gironde s’incline finalement en quarts de finale de la Coupe de l’UEFA, contre Parme, le futur vainqueur.
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Johan Micoud, le début d’un parcours chaotique
En août 1999, le néo champion de France est récompensé de sa belle saison. Roger Lemerre, le sélectionneur français, fait appel à lui pour disputer plusieurs matchs amicaux. Lors de la victoire un à zéro face à l’Irlande du Nord, il connait sa première sélection. Suite à ce match, l’ancien Cannois est appelé régulièrement avec les Bleus. Mais, en réalité, il ne participe qu’à peu de matchs. Et pour cause, un certain Zinédine Zidane lui barre la route. Encore lui.
Parallèlement, avec les Bordelais, Johan Micoud continue d’impressionner. C’est lui qui détient les clés du collectif Girondins. En première division, l’international français délivre plusieurs caviars et boucle sa saison avec neuf buts en cinquante et un match toutes compétitions confondues. Suite à sa belle saison, il est logiquement sélectionné pour participer à l’Euro 2000 avec les Bleus. Mais, une nouvelle fois barré par la concurrence, le milieu bordelais ne dispute seulement que le troisième match de poule, alors que la France est déjà qualifiée. Le métronome parvient tout de même à saisir sa chance et délivre une passe décisive sur corner lors de la victoire trois à deux contre les Pays-Bas.
Si le Français joue peu dans cet Euro, il contribue tout de même au sacre final des Bleus. Deux ans après son titre de champion du monde, l’équipe de France remporte la compétition européenne. Un évènement fort dans la carrière de Johan Micoud quand on connaît la suite de son histoire avec sa sélection.
Après l’Euro, le dix français continue d’être appelé à plusieurs reprises. Il participe notamment à la belle victoire quatre à zéro face à la Turquie. Si ce match paraît anecdotique, en réalité, il ne l’est pas. C’est la seule fois où Johan Micoud et Zinédine Zidane seront alignés ensemble. Un fait que déplorera Willy Sagnol.
« Pour le premier match que j’ai fait en équipe de France, j’avais eu 10-12 ou 15 minutes, je ne sais plus, c’était en Turquie et on avait été gagner 4-0 : Zidane et Micoud avaient été alignés ensemble et ça avait été, de la part des deux, un récital ! Je ne sais pas pourquoi cela n’a pas été renouvelé. »
Un départ à l’étranger
A vingt sept ans, Johan Micoud souhaite découvrir un nouveau championnat. Et cela tombe bien, puisque Parme est intéressé par ses services. Le club italien paye le montant de la clause libératoire (quarante cinq millions de francs) du milieu bordelais qui intègre alors un effectif comptant déjà trois Français dans ses rangs – Lilian Thuram, Alain Boghossian et Sabri Lamouchi.
Encore une fois, l’adaptation de Johan Micoud est rapide. Malgré la forte concurrence, l’ancien Bordelais réussit à s’intégrer sans trop de difficultés. Pour sa première saison, il participe à trente neuf matchs pour sept buts toutes compétitions confondues. Il prend part à la quatrième place finale acquise en championnat et contribue également au beau parcours en Coupe de l’UEFA.
En revanche, avec Parme, l’international français connait une nouvelle désillusion. Pour la troisième fois de sa carrière, le milieu offensif s’écroule en finale d’une coupe. Un nouvel échec sonnant.
Lors de sa deuxième saison, il connait d’ailleurs plus de difficultés. Micoud doit faire face à un nouveau concurrent à son poste, le Japonais Nakata. Le temps de jeu du Français est alors fortement diminué, bien qu’il participe tout de même à vingt-sept matchs dans la saison. Si la saison parmesane est délicate, avec le départ notamment de nombreux cadres au mercato hivernal, les coéquipiers de Micoud se reprennent tout de même en fin d’exercice. Les Parmesans surclassent la Juventus en finale de la Coupe d’Italie pour remporter un titre totalement inattendu. Avec cette nouvelle coupe, le Girondin agrandit encore un peu plus son palmarès. Il compte désormais trois trophées.
La Coupe du Monde 2002, la catastrophe asiatique
Malgré sa saison en dent de scie, Johan Micoud fait tout de même partie des vingt-trois joueurs sélectionnés pour la Coupe du Monde 2002. Aligné en tant que meneur de jeu, il participe à la catastrophe asiatique des Bleus. Il ne parvient pas à retrouver son niveau dans la compétition, et ne peut empêcher la défaite deux à zéro face au Danemark. Le Parmesan participe également au match nul zéro à zéro contre l’Uruguay. Ces résultats entrainent ainsi l’élimination précoce de l’équipe de France, pourtant championne du monde et d’Europe en titre. Avec une sortie dès les phases de poule, la Coupe du monde 2002 est encore aujourd’hui une des déceptions les plus importantes de l’histoire des Bleus.
Le Werder Brême, un nouveau départ pour Johan Micoud
Après ses deux ans passés en Italie, Johan Micoud souhaite changer d’air. A l’été 2002, il tente l’expérience Bundesliga en rejoignant le Werder Brême. Un choix fort du français, qui fut remis en cause par ses proches à l’époque.
« Mon frère m’a dit : « putain, quand tu es parti à Brême, je pensais que c’était fini, on se demandait ce que tu allais foutre là-bas’ » C’est la vérité, même moi… Mais là, c’est la rencontre avec des mecs, qui m’ont fait me dire qu’il fallait partir dans un truc comme ça. » déclare le joueur après avoir pris sa retraite.
Mais, rapidement, le milieu offensif rassure ses proches grâce à ses prestations sur le terrain. Il s’affirme comme un joueur vedette du championnat allemand. Les supporters l’apprécient pour son élégance. Rapidement, le Français devient le chouchou des supporters du Werder qui le surnomment « Le Zidane de la Weiser » ou « Le Chef ».
« Un mec collait des autocollants partout à mon effigie en Europe. Ils ont fait des tee-shirts, il y a une continuité… Mais c’est très allemand, il y a un vrai respect pour les sportifs et ce qu’ils ont pu amener au club. L’Allemand est vraiment très respectueux de ça. » s’amuse-t-il quelques années plus tard.
Pour sa première année avec le Werder, l’ancien Parmesan dispute trente cinq matchs pour un total de sept buts. Une première saison réussie. D’autant plus que Johan fait également partie des meilleurs passeurs du championnat.
Qualification pour la coupe Intertoto, sixième place de Bundesliga et demi-finale de Coupe d’Allemagne, les joueurs du Werder réalisent une bonne saison. Des résultats satisfaisant qui s’expliquent par la bonne ambiance au sein du vestiaire d’après Johan.
« J’arrive, je trouve un groupe fantastique, qui en une semaine m’accepte comme si j’avais été toujours là. Il y a quinze nationalités différentes, ça partait en vrille, ça chambrait, ça déconnait… Et puis ça part direct »
Exploit historique
La seconde saison du natif de Cannes en Allemagne choque tout le monde. Rejoint par le Français Valérien Ismaël, Johan Micoud forme avec son acolyte un des duos les plus impressionnants de Bundesliga. Les deux joueurs réussissent une saison quasi parfaite et mènent vers les sommets le Werder Brême. Le club allemand est magnifique à voir jouer. Tous les spécialistes de la Bundesliga s’attachent à dire que cette équipe est une des plus belles de la décennie. Et si le Werder Brême est séduisant, cela ne l’empêche pas d’être efficace. Au terme d’une saison historique, les verts et blancs réalisent l’exploit de remporter la coupe et le championnat. Avec quatorze buts et sept passes décisives délivrées, Johan Micoud réalise quant à lui, la plus belle saison de sa carrière.
Malgré ses bonnes performances en club, Jacques Santini, le successeur de Roger Lemerre, ne semble pas faire confiance au joueur du Werder, qui une fois de plus est dans l’ombre de Zizou. Durant son mandat, le sélectionneur français ne convoque le joueur offensif qu’à une seule reprise, à l’occasion d’un match amical contre les Pays-Bas en 2004. Une décision difficilement compréhensible pour le Français qui remettra en cause les choix de son sélectionneur à différentes occasions. A ce moment là, Johan Micoud ne le sait pas encore, mais le match contre les Néerlandais sera son dernier avec l’équipe de France, scellant ainsi son histoire compliquée avec les Bleus.
L’impact de Johan Micoud en Allemagne
La saison suivante, Johan Micoud et ses amis confirment leur belle saison en Bundesliga. Les verts et blancs terminent à la troisième place du championnat, synonyme de qualification pour le tour préliminaire de la C1. Les hommes de Thomas Schaaf parviennent également à se hisser jusqu’en huitièmes de finale de Ligue des Champions. Finalement, face à l’Olympique lyonnais, bête noire de Micoud, le Werder s’écroule totalement, et perd dix à deux sur l’ensemble des deux matchs.
Cette saison là, le milieu de terrain marque onze buts toutes compétitions confondues. Il glisse également de nombreux caviars pour ses partenaires. Notamment à Miroslav Klose, avec qui il entretient une relation privilégiée sur le terrain. A tel point que le sérial buteur considère le Français comme l’un des trois meilleurs joueurs qu’il a côtoyé, avec Toni Kroos et Thomas Muller. Une déclaration qui peut paraître étonnante, au vu de la carrière de Klose, mais qui en dit long sur le réel niveau de Micoud :
« Thomas se distingue par son intelligence de jeu, un contact visuel suffisait souvent pour que nous puissions nous trouver. Toni se distingue par sa technique, sa vista, son assurance balle au pied et ses capacités stratégiques. Le Français Micoud était du même acabit » explique l’Allemand dans les colonnes de Kicker.
Véritable chef d’orchestre, Johan Micoud a également contribué à la réussite de Klose, en lui donnant des consignes pour faire évoluer son jeu :
« Quand je suis arrivé au Werder, il m’a souvent crié : « Arrête de toujours partir vers l’avant ! Viens aussi ici un instant, nous voulons jouer au football ici. » »
La saison suivante, en 2005/2006, le Werder Brême réalise à nouveau une bonne année en terminant second du championnat. Portés vers l’avant, les joueurs du Werder inscrivent soixante-dix neufs buts dans la saison, faisant d’eux l’équipe la plus prolifique du championnat. A titre personnel, Johan Micoud effectue à nouveau une saison pleine. Avec plus de dix buts inscrits et dix passes décisives réalisées, le métronome du Werder Brême, effectue ce que les fans de basketball appellent un double-double. La saison du Français est également marquée par un fait majeur. Il dépasse Gilbert Gress et devient le meilleur buteur français de l’histoire de la Bundesliga. Un record qui sera par la suite dépassé par Franck Ribéry.
Malgré ses bonnes prestations avec le Werder, l’histoire entre Johan et l’équipe de France reste au point mort. Raymond Domenech ne lui offre jamais la chance de rejouer en bleu. Un choix qu’à du mal à digérer le milieu Français.
« Je n’ai pas eu de contacts avec lui depuis dix ans, c’était en Espoirs. S’il reste bloqué là-dessus, c’est un manque d’intelligence. C’est un imbécile » déclare alors Johan Micoud au sujet du sélectionneur français dans un entretien pour L’Equipe réalisé en 2006.
Johan Micoud, le retour d’un ancien
Suite à sa non sélection pour l’euro 2006, Johan Micoud a besoin de se rapprocher de sa famille. Il souhaite pour cela retourner en France. Et en juin, la nouvelle tombe. Après plus d’une centaine de matchs disputés en Bundesliga, le métronome français quitte le Werder Breme et s’engage à Bordeaux. Quelques années après son départ, c’est en héro que le frenchie revient en Gironde, club dans lequel il s’était totalement révélé.
Les retrouvailles entre Johan et Bordeaux ne se déroulent pas totalement comme prévu. Le Français a du mal à s’intégrer dans le système du rigide Ricardo. Les Bordelais parviennent tout de même à sauver leur saison en Coupe de la Ligue. Pour la troisième fois de sa carrière, Johan Micoud se retrouve en finale. Et face à un adversaire qu’il connait bien… l’Olympique Lyonnais. Grâce à un but d’Henrique sur un corner parfaitement frappé par son virtuose, les Girondins retrouvent le goût de la victoire en s’imposant un à zéro. Une véritable délivrance pour Johan qui prend enfin le dessus sur le club de Jean Michel Aulas. Dans le même temps, il fait aussi un trait sur toutes ses finales perdues auparavant.
En 2007/2008, Johan Micoud parvient à se relancer. Sous les ordres de Laurent Blanc, il semble plus à l’aise et redevient performant. Les hommes de l’ancien champion du monde 1998 terminent seconds du championnat, au terme d’une saison collectivement réussie. En Coupe de l’UEFA, les Bordelais finissent premiers de leur groupe en remportant quatre matchs. Ils seront finalement éliminés par la suite, en huitième de finale, contre Anderlecht.
En fin de saison, à trente quatre ans , le Français est libre de tout contrat. Malgré sa dernière saison correcte, les Girondins ne souhaitent pas le prolonger. Jean-Louis Triaud, le président du club, recrute alors un autre génie en devenir. Un certain Yohann Gourcuff. De son côté, touché et conscient de son âge, l’ancien parmesan décide finalement de mettre un terme à sa carrière en septembre 2008.
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Avec dix-sept sélections, plus de cinq cents matchs professionnels et six titres, le génie cannois reste dans l’histoire du football français. Souvent dans l’ombre de Zidane, le Français brillait pourtant sur le terrain. Véritable artiste à l’élégance rare, beaucoup de ses coéquipiers ne comprennent pas comment Johan n’a pas eu une carrière plus importante.
« Il a été au Werder Brème – qui était un bon club, mais pas non plus le Bayern -, il a été dans la grosse équipe de Parme mais ce n’était pas non plus le Milan ni la Juve… Et voir Micoud avec seulement 17 sélections ça me donne l’impression que l’ombre de Zizou lui a porté tort et qu’il fait une carrière en dessous de ce qu’il aurait, pour moi, mérité. » déclare notamment Roland Courbis à son sujet sur RMC quelques années plus tard.
Des gestes de grande classe et un parcours atypique, tel est l’histoire de Johan Micoud. Véritable héro partout là où il est passé, le Français fait partie de ces joueurs uniques. De ces joueurs dont on se souvient même des années après. Pourtant, il n’a peut être pas eu la carrière qu’il aurait mérité d’avoir. Mais ne serait-ce pas le lot de tous ces génies incompris ? En tout cas, depuis Johan Micoud, la France est à la recherche d’un nouvel héritier pour son poste de numéro dix…
Sources :
- Raphaël Cosmidis, Philippe Gargov, Christophe Kuchly, Julien Momont, « L’Odyssée du 10 »
- Girondis4ever, « Johan Micoud : « Quelques années plus tard, mon frère m’a dit dit ‘putain, quand tu es parti à Brême, je pensais que c’était fini, on se demandait ce que tu allais foutre là-bas’ » », OneFootball, avril 2020
- « Johan Micoud », Football-the-story, les légendes du foot, avril 2020
- « Johan Micoud fait partie des trois coéquipiers qui ont le plus marqué Miroslav Klose », SO FOOT
- « Biographie Johan Micoud », Le Parisien
Crédits photos : Icon Sport